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ÉTUDES DE LITTÉRATURE

jugerons jamais aucun desdits habitants sur leurs idées creuses, mais uniquement sur leurs actions ; car telle est notre justice. »

Si Voltaire trouve immoraux les dogmes catholiques, ce qu’il déteste surtout dans le catholicisme, c’est son intolérance et sa cruauté. Souvent il a fait le compte des victimes de l’Église. On lui reprochait de se répéter. Mais, répond-il, je ne dirai jamais assez toutes les horreurs dont le catholicisme s’est rendu coupable, dont, à notre époque encore, il se glorifie. « Chacun devrait avoir au chevet de son lit un cadre où fût écrit en grosses lettres : Croisades sanglantes, massacres de la Saint-Barthélémy y massacres d’Irlande, massacres des vallées de Savoie, massacres juridiques, massacres de l’Inquisition. L’on jetterait tous les matins un œil d’indignation sur ce catalogue et l’on dirait pour prière : Mon Dieu, délivrez-nous du fanatisme. »

Le fanatisme, du temps même de Voltaire, exerce toujours sa fureur. L’an 1760, trente-deux Juifs de Lisbonne montent sur le bûcher. En France, de 1745 à 1763, huit prédicants sont pendus, qui n’avaient eu d’autre tort que « de prier Dieu pour le roi en patois et de donner à quelques paysans une goutte de vin et un morceau de pain levé ». L’an 1750, on brûle une sorcière. Vers la même époque, deux jeunes gens, deux frères, sont accusés de sorcellerie. Le tribunal, chose incroyable, les acquitta. Attendez. Leur père, qui était dévot, met le feu à la grange dans laquelle ils couchaient et répare ainsi devant Dieu l’injustice du juge. Ai-je besoin de rappeler les procès de Calas, de Sirven, du chevalier La Barre ? Depuis les premiers siècles jusqu’au temps de Voltaire, l’histoire du ca-