Page:Pellissier - Études de littérature et de morale contemporaine, 1905.djvu/280

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
270
ÉTUDES DE LITTÉRATURE

et Voltaire le déclare expressément, elle consiste dans les règles de morale communes au genre humain.

Une idée sur laquelle il revient très souvent, c’est que la morale unit les hommes entre eux. La théologie divise les hommes et la morale les unit.

La théologie divise les hommes. Elle traite de questions insolubles, généralement inintelligibles ; et ces questions partagent la chrétienté en sectes hostiles qui s’anathématisent l’une l’autre quand elles ne s’entr’égorgent pas. Au contraire, la morale unit les hommes. Chaque nation a ses mœurs propres et ses rites particuliers. Mais, quant aux principes, toutes les nations sont d’accord. Zoroastre et Confucius, Zaleucus et Socrate, recommandent les mêmes vertus. Tandis que la théologie excite les discordes, la morale, qui est universelle, engendre la paix. « Que diriez-vous d’une famille toujours prête à se battre pour savoir comment il faut saluer le père ? Eh ! mes enfants, il s’agit de l’aimer. » Il s’agit aussi de faire son devoir d’homme. Le culte que nous devons rendre à Dieu, consiste surtout dans la pratique des vertus humaines. Ne soyons pas des saints, soyons des hommes vertueux.

Qu’est-ce, pour Voltaire, qu’être vertueux ?

Les catholiques distinguent ce qu’on appelle les trois vertus théologales : la foi, l’espérance, la charité. Or, la charité n’est louable que si elle se traduit en bienfaits ; c’est par charité que tels inquisiteurs brûlèrent les hérétiques. Quant à l’espérance, « craignant selon qu’on nous menace, nous espérons selon qu’on nous promet ». Mais la foi, enfin, comment pourrait-elle s’appeler une vertu ? Les dogmes qui en sont l’objet nous semblent ou bien vrais, et alors nous n’avons nul