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PREMIÈRE PARTIE DU ROMAN DE LA ROSE

dien des roses. Danger a pour compagnons Male-Bouche, Peur et Honte ; celle-ci, la mieux des trois, est née d’un regard de Raison jeté sur Méfait. Chasteté, qui doit régner sur les boutons et les roses, a demandé à Raison sa fille pour les garder. En même temps Jalousie lui a enyoyé Peur (v. 2837-2877). Bel-Accueil ayant offert une feuille verte du bouton à l’amant, celui-ci s’enhardit, lui raconte comment Amour l’a enrôlé sous sa bannière et lui avoue qu’il désire le bouton. Bel-Accueil s’effraie et se récrie. Danger sort de sa cachette, reproche à Bel-Accueil d’avoir amené l’étranger près des roses et force l’amant à repasser la haie (v. 2878-2962).

Depuis longtemps déjà Guillaume s’abandonnait à la douleur de ne plus voir le gracieux bouton, lorsque Raison descendit de sa haute tour et vint le sermonner, lui montrant combien il a eu tort de fréquenter Oiseuse et Déduit et cherchant à lui faire quitter le service d’Amour ; mais il prit mal ces remontrances et Raison le laissa (v. 2963-3110).

Amant se rappelle qu’Amour lui a conseillé, lorsqu’il aurait des peines, de les alléger en les confiant à un compagnon sûr ; celui en qui il se fie le plus est Ami ; il va le trouver et lui conte son malheur. Ami le console, et lui donne entre autres conseils celui d’apaiser Danger. Il revient alors à la haie, où il trouve Danger courroucé et menaçant ; il le supplie si humblement que le vilain lui pardonne, à la condition qu’il n’approchera plus des roses ; il se tient donc à distance, d’où il se contente d’admirer en soupirant. Enfin Franchise et Pitié viennent à leur tour supplier Danger et obtiennent de lui que l’amant puisse revoir Bel-Accueil. Celui-ci, amené par Franchise, vient, plus aimable que jamais, prendre Guillaume par la main et l’introduit dans l’enclos des roses (v. 3111-3364).

Le bouton avait grossi ; il était à moitié ouvert, mais pas encore complètement épanoui. Guillaume ne l’en trouve que plus beau et l’en aime davantage. Peu à peu encouragé par les amabilités de Bel-Accueil, il lui demande la permission de baiser la rose ; Bel-Accueil, qui craint d’offenser Chasteté, s’y refuse d’abord, puis, à l’instigation de Vénus, la mortelle ennemie de Chasteté, il accorde le baiser tant désiré (v. 3365-3508).