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NOTICE

laquelle il s’étoit élevé à l’empire. L’anarchie et le désordre régnoient partout. Euphrosyne, son épouse, montroit plus d’énergie, et pouvoit seule être redoutable ; mais ses scandaleuses débauches lui avoient attiré les punitions les plus humiliantes, et il lui étoit désormais impossible de reprendre son ancien ascendant. À la première tentative de l’héritier légitime du trône, ajoutoient-ils, les grands et le peuple se déclareront ; il y aura un bouleversement général, et l’usurpateur sera renversé. Les seigneurs qui avoient suivi le prince grec en Allemagne appuyèrent les demandes de ses envoyés.

Le conseil des Croisés s’étant assemblé pour délibérer sur ces propositions, tous les Vénitiens les accueillirent, et s’efforcèrent de prouver combien elles étaient avantageuses. Il n’y eut pas la même unanimité du côté des Français. Le clergé se divisa : l’abbé de Vaux de Cernay, et ceux qui s’étoient opposés à l’expédition de Zara, s’opposèrent encore plus vivement à ce qu’on attaquât l’Empire grec. Ils représentèrent l’entreprise comme folle, extravagante et impossible. L’abbé de Los et d’autres ecclésiastiques soutinrent l’opinion contraire ; et, rappelant les obstacles qui avoient nui au succès des premières croisades, ils s’efforcèrent de prouver qu’on étoit obligé en conscience de soutenir le prince grec. Ville-Hardouin et presque tous les seigneurs français se rangèrent de cet avis. Ils considérèrent sans doute que, sans l’appui des Vénitiens, il étoit impossible de rien tenter dans la Terre-Sainte, et furent éblouis par l’avantage qui résulteroit pour la religion d’une alliance solide avec l’Empire grec, et de la réu-