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[1650] MÉMOIRES

d’avoir la moindre pensée pour leur liberté. Voilà ce que la Reine, le cardinal et les subalternes disoient à tous momens ; voilà ce que le premier président et le maréchal de Gramont se persuadoient être bon et sincère ; et voilà ce qui eût tenu M. le prince dans les fers peut-être toute la vie du Mazarin, sans le bon sens et la fermeté de la palatine. Vous voyez de quelle nécessité il étoit de couvrir notre jeu dans une conjoncture où, au moins, pour l’ouverture de la scène la contenance du premier président nous étoit très-considérable. Il faut avouer qu’il n’y a, jamais eu de comédie si bien exécutée. Monsieur fit croire au maréchal de Gramont qu’il vouloit la liberté des princes, mais qu’il ne la vouloit que par la cour, parce qu’il n’y avoit qu’elle qui pût la donner sans guerre civile ; et qu’il avoit découvert que les frondeurs ne la vouloient pas dans le fond. Les amis de M. le prince firent voir au premier président que, comme nous les voulions tromper en nous servant d’eux pour pousser Mazarin, sous prétexte de servir M. le prince, ils se vouloient servir de nous pour donner la liberté à M. le prince, sous prétexte de pousser Mazarin. Je donnois par mes manières toutes les apparences possibles à ces discours et à ces soupçons, et cette conduite fit tous les effets que nous voulions elle échauffa pour le service des princes le premier président, et tous ceux du corps qui avoient de la disposition contre la Fronde elle empêcha que le cardinal ne se précipitât dans quelque résolution qui ne nous plût pas, parce qu’elle lui donna lieu d’espérer, qu’il détruiroit les deux partis l’un par l’autre et elle couvrit si bien notre marche, que l’on ne faisoit pas seu-