Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/440

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me parut, de n’être pas trop éclairé dans les premiers jours de la fonction de la surintendance ; et Bordeaux, qui étoit son confident principal, me fit un discours qui me marqua même de l’impatience que le Roi fût déjà hors de Paris. Celle des frondeurs n’étoit pas moindre, et parce qu’ils voyoient la nécessité qu’il y avoit effectivement à ne pas laisser établir M. le prince au delà de la Loire, et parce qu’ils se tenoient beaucoup plus assurés de l’esprit de Monsieur lorsqu’il étoit éloigné de la cour que lorsqu’il étoit proche. Voilà ce qui me parut de la disposition de tout le monde sans exception, à l’égard du voyage du Roi ; et je ne comprends pas sur quoi l’on a pu fonder cette diversité d’avis que l’on a prétendu et même écrit, ce me semble, avoir été dans le conseil sur ce sujet.

Vous voyez donc qu’il n’y eut aucun mystère au départ du Roi ; mais en récompense il y en eut beaucoup dans la suite de ce départ, parce que chacun y trouva tout le contraire de ce qu’il s’étoit imaginé. La Reine y rencontra plus d’embarras, sans comparaison, qu’elle n’en avoit à Paris, par les obstacles que M. de Châteauneuf mettoit au rappel de M. le cardinal. Les sous-ministres eurent des frayeurs mortelles que l’habitude et la nécessité n’établissent à la fin dans l’esprit de la Reine M. de Châteauneuf et M. de Villeroy, qui paroissoit lassé de leurs avis. M. de Châteauneuf, de son côté, ne trouva pas le fondement qu’il avoit cru aux espérances dont il s’étoit flatté lui-même à cet égard, parce que la Reine demeura toujours dans un concert très-étroit avec le cardinal, et avec tous ceux qui étoient véritablement attachés à ses intérêts.