Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/268

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autrefois auroit éte honteux, parce qu’on aimoit alors sa patrie, et par conséquent ceux qui la servoient bien.

L’altération qui est arrivée dans les mœurs, a fait encore que le respect, qui, chez les peuples dont j’ai parlé, étoit la perfection de l’estime, en souffre l’exclusion parmi nous, et peut s’allier avec le mépris.

Le respect n’est autre chose que l’aveu de la supériorité de quelqu’un. Si la supériorité du rang suivoit toujours celle du mérite, ou qu’on n’eût pas prescrit des marques extérieures de respect, son objet seroit personnel comme celui de l’estime ; et il a dû l’être originairement, de quelque nature qu’ait été le mérite de mode. Mais comme quelques hommes n’eurent pour mérite que le crédit de se maintenir dans les places que leurs aïeux avoient honorées, il ne fut plus dès-lors possible de confondre la personne dans le respect que les places exigeoient. Cette distinction se trouve aujourd’hui si vulgairement établie, qu’on voit des hommes réclamer quelquefois pour leur rang, ce qu’ils n’oseroient prétendre pour eux-mêmes. Vous devez, dit-on humblement, du respect à ma place, à mon rang ; on se rend assez de justice pour n’oser dire à ma personne. Si la modestie fait aussi tenir le même langage, elle ne l’a pas inventé,