Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome IV, 2 (éd. Robin).djvu/119

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NOTICE

résultat positif. Par malheur la pauvreté de notre information ne permet pas de chercher dans la chronologie une issue à nos incertitudes. — Entre 401, date du départ de Xénophon pour l’expédition de Cyrus, deux ans avant le procès de Socrate, et 387 (ou peut-être un peu plus tôt), époque probable de son établissement dans le domaine de Scillonte en Élide, la vie de Xénophon s’est écoulée entièrement en Asie, puis à Sparte, et de nouveau en Asie auprès d’Agésilas, exception faite d’un bref séjour à Athènes quelques mois après la mort de Socrate. C’est donc une existence peu favorable à la composition littéraire : celle-ci, par conséquent, n’est vraisemblable qu’à partir du moment où, à Scillonte, Xénophon jouit enfin de paisibles loisirs, Ainsi l’historicité de ses écrits socratiques est rendue fort douteuse par l’éloignement de ses souvenirs et, d’un autre côté, par la difficulté de les contrôler, du fait qu’il vit en dehors du milieu athénien. Par contre, il n’y a rien là qui s’oppose à la possibilité pour lui d’avoir connu des compositions socratiques écrites par d’autres, et rien non plus qui empêche de croire qu’il ait écrit son Banquet avant celui de Platon, s’il est vrai du moins que notre dialogue ne puisse guère avoir été composé avant 385. Remarquons enfin que l’apparition du pamphlet de Polycrate, si importante pour juger de la structure des Mémorables et pour y discerner les retouches ou les additions (cf. p. xi, n. 1), n’a rien à voir dans la question du Banquet de Xénophon : celui-ci en effet n’y dit pas un mot d’Alcibiade, ni de ses relations avec Socrate. Cette remarque serait en faveur de la priorité de Xénophon[1].

En résumé il ne paraît pas possible de prendre parti, sinon pour des motifs tout personnels, d’ordre esthétique ou bien d’ordre psychologique. — Tout d’abord il serait bien étrange qu’un artiste de l’envergure de Platon eût usé, pour composer son Banquet, du procédé misérable qui consisterait à transposer niaisement les données d’un devancier, à substituer le nom du seul Agathon à ceux de Callias et d’Autolycus, à

  1. Ad. Roquette, De Xenophontis vita (Progr. Königsberg 1884) date le Banquet de 380 environ, après les Mémorables, postérieurs eux-mêmes au troisième des écrits socratiques de Xénophon, l’Économique, qui serait de 386. Mais ce sont des considérations stylistiques qui l’ont déterminé (cf. mon article déjà cité, p. 22 et n. 1).