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LE BANQUET

révélateur de la fiction et un artifice de la composition littéraire. De la même façon, le sommeil d’Apollodore et l’appesantissement de son esprit (223 cd) sont le procédé dont usera Platon pour détacher, en la dégageant de tout ce qui pourrait en diluer l’effet, cette réflexion sur la tragédie et la comédie, qu’à la fin du dialogue il a voulu proposer à la méditation de ses lecteurs.


Première partie,
178 a-199 b.
Les cinq premiers discours.

La première partie du Banquet est remplie par cinq discours, d’étendue inégale et, semble-t-il, intentionnellement alternée, de façon à donner toute son ampleur à ce qui est vraiment important sans risquer pourtant de lasser l’attention. Chacun de ces cinq discours a son individualité propre, dans son contenu doctrinal comme dans son tour d’esprit et dans son style, si bien qu’il suffit par lui-même à définir et à peindre celui qui le prononce, réserve faite des traits de caricature que Platon y a certainement dessinés. C’est dire qu’on n’a pas le droit d’y chercher, même sur des points particuliers[1], la pensée de celui-ci, à moins qu’ailleurs il ne reprenne l’idée à son compte d’une manière indiscutable[2]. Du reste, aucun doute ne semble permis quand on voit la première partie s’achever (198 c sqq.) sur une sorte de fin de non-recevoir de Socrate à l’égard de tout ce qui a été dit jusque-là et par l’affirmation énergique de la nécessité d’employer désormais une méthode radicalement différente. Toute la première partie représente donc, sinon toujours le point de vue des Rhéteurs et des Sophistes, du moins un point de vue étranger à la philosophie.


Phèdre
(178 a-180 b).

Le premier orateur est Phèdre de Myrrhinonte, celui qui, dans le dialogue auquel son nom a été donné par Platon, est l’interlocuteur de Socrate. On l’y retrouve tel qu’il est

  1. Comme le fait par exemple Plotin (Enn. III 5, 2) pour la distinction des deux Aphrodites et des deux Amours, au début du discours de Pausanias (180 c-181 a). Peut-être Victor Brochard est-il le premier à avoir aperçu cette vérité, dans sa belle étude Sur le « Banquet » de Platon, Année philos. XVII, 1907 (Études de philosophie ancienne et moderne, p. 60-94).
  2. Ainsi pour le plan à suivre dans un éloge, cf. supra, p. xxxii.