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NOTICE

ici (cf. p. 8 n. 2) : préoccupé de sa santé, attentif à son hygiène, plein de foi dans les théoriciens de la médecine et aussi bien de la rhétorique ou de la mythologie, curieux de savoir mais dépourvu de jugement, superficiel dans ses curiosités[1] et naïf dans l’expression de ses sentiments, admirateur fervent des réputations dûment cataloguées et consacrées. Ainsi le voit-on, au début du Phèdre, réparant par une marche les effets pernicieux qu’a pu avoir pour sa santé la matinée qu’il vient de passer chez Lysias, entre les murs d’une chambre, assis et l’esprit tendu. Entendre une seule fois la lecture d’un beau discours ne lui suffit pas : il fait bisser les passages qui l’ont enchanté ; bien plus, il faut qu’on lui prête le manuscrit, afin de repasser ces passages favoris ; il finira par apprendre le tout par cœur (228 ab) ! Sa passion studieuse pour la rhétorique éclate en maint endroit (258 e, 266 c, 269 d, 276 e, etc.), et il n’est pas moins friand de mythologie (229 bc, 259 b). L’autre trait saillant de son caractère apparaît dans la façon dont il s’applaudit d’être sorti sans chaussures, et ce n’est sans doute pas, quoi qu’il en dise, par hasard, mais pour obéir à quelque précepte de régime ; il connaît dans la campagne les bons coins, où il y a de l’ombre (229 ab) ; il ne veut pas se remettre en route avant que la chaleur soit un peu passée (242 a, 279 b) ; il a lu Hippocrate (270 c), et ce n’est pas seulement le médecin Éryximaque qui est son ami, c’est aussi le père de celui-ci, Acoumène, autre médecin (268 a, 227 a). Dans le Protagoras (315 c), il est, à côté du fils, assis au pied du trône du haut duquel Hippias d’Élis, le Sophiste encyclopédique, répond à ceux qui l’entourent sur des questions de physique et d’astronomie. Et vraiment il a trouvé là le maître qui lui convient, puisque sa curiosité est universelle comme la science de celui-ci. Est-ce cette passion de s’instruire et d’entendre parler qui fit négliger à Phèdre le soin de sa fortune ? Ce n’est pas en tout cas sa mauvaise conduite, dit occasionnellement Lysias dans un de ses plaidoyers (xix, 15), et de son côté Platon lui prête à l’égard des jouissances sensuelles un langage plein d’indignation (Phèdre

  1. C’est ainsi qu’il prend plaisir à entendre Socrate discuter (194 d). Mais c’est son adresse qu’il admire, et il ne se réforme pas en l’écoutant.