Page:Pline le Jeune - Panégyrique de Trajan, trad. Burnouf, FR+LA, 1845.djvu/27

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sur l’empereur ; la voix de l’empereur vous en a remis le fardeau. L’adoption fut un recours à votre assistance, un appel à votre courage, comme autrefois les grands généraux, occupés à des guerres étrangères et lointaines, en étaient rappelés pour secourir la patrie. Ainsi, dans un seul et même instant, le père et le fils se sont fait l’un à l’autre le présent le plus magnifique : il vous a donné l’empire, vous le lui avez rendu. Seul donc jusqu’à ce jour vous avez, en recevant un si grand don, égalé la reconnaissance au bienfait ; que dis-je ? le bienfaiteur est lui-même votre redevable : le partage de la puissance ne fit qu’apporter, à vous plus de soucis, à lui plus de repos.

VII. O route nouvelle et inouïe vers le rang suprême ! ce n’est point l’ambition du pouvoir, ni une crainte personnelle ; c’est l’intérêt d’autrui et un péril étranger qui vous ont fait empereur. Qu’on dise, je le veux, que vous avez atteint ce qu’il y a de plus grand parmi les hommes ; plus grand encore était le bonheur que vous avez quitté : vous avez renoncé, sous un bon prince, à la condition privée. Vous êtes entré dans une société de travaux et de soucis ; et ce ne sont pas les joies et les prospérités de ce haut rang, ce sont ses épines et ses charges qui vous l’ont fait accepter. Vous avez consenti à recevoir l’empire, quand un autre se repentait de l’avoir reçu. Nulle parenté, nulle liaison ne recommandait le fils adoptif à celui qui devenait son père ; rien, si ce n’est une communauté de vertus qui rendait l’un digne d’être choisi, et l’autre de le choisir. Aussi ne fûtes-vous pas adopté, comme plusieurs avant vous, par complaisance pour une femme : ce n’est pas l’époux d’une mère, c’est un prince qui a fait de vous son fils ; Nerva est devenu votre père, dans le même esprit qu’il était le père des Romains. Et c’est ainsi qu’un fils doit être choisi, lorsqu’il l’est par un prince. Eh quoi ! vous allez transmettre à un seul homme le sénat et le peuple romain, les armées, les provinces, les alliés ; et cet homme, vous le prendriez dans les bras d’une épouse ! vous ne chercheriez l’héritier de la souveraine puissance que dans votre maison, au lieu de promener vos regards sur toute la république, et de tenir pour le premier et le plus proche de vos parents celui que vous trouverez le meilleur et le plus semblable aux dieux ! C’est entre tous qu’il faut choisir celui qui doit commander à tous. Il ne s’agit pas de donner un maître à vos esclaves, pour que vous puissiez vous contenter, pour ainsi