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QUATRIÈME ENNÉADE.


II. l’âme n’est pas l’harmonie ni l’entéléchie du corps.

[1o L’âme n’est pas l’harmonie du corps.]

Puisque l’âme n’est pas corporelle, il faut déterminer sa nature propre. Admettrons-nous qu’elle est une chose distincte du corps, mais dépendante de lui, une harmonie, par exemple ? Pythagore, en effet, ayant employé ce mot dans un sens particulier, on a cru ensuite que l’harmonie du corps était quelque chose de semblable à l’harmonie d’une lyre. Comme la tension produit dans les cordes une manière d’être (πάθημα) que l’on appelle harmonie, de même, les éléments contraires étant mélangés dans notre corps, telle mixtion (ἡ ποιὰ ϰρᾶσις) produit la vie et l’âme, qui n’est ainsi qu’une certaine manière d’être de cette mixtion (τὸ ἐπὶ τῇ ϰράσει πάθημα)[1].

    en est ainsi, rien de ce qui est ne saurait exister : car ce qui a la puissance d’être peut n’être pas encore… Comment y aura-t-il donc mouvement, s’il n’y a pas de cause en acte ? Ce n’est pas la matière qui se mettra elle-même en mouvement ; ce qui l’y met, c’est l’art de l’ouvrier. etc. » (Métaphysique, liv. XII, 6 ; t. II, p. 217 de la trad. de MM. Pierron et Zévort.) Voy. aussi Enn. II, liv. V, § 3 ; t. I, p. 231.

  1. Plotin a déjà dit ci-dessus (§ 2, 3) que, selon certains philosophes, l’âme est une mixtion et une manière d’être de la matière. Il reproduit ici, en les résumant, les critiques dirigées contre cette opinion par Platon dans le Phédon (t. I, p. 250, 264-271 de la trad. de M. Cousin) et par Aristote dans le traité De l’âme (t. I, 4, p. 135-139 de la trad. de M. Barthélemy-Saint-Hilaire). Voici comment Platon formule l’opinion combattue ici par Plotin : « L’idée que nous nous faisons ordinairement de l’âme revient à peu près à celle-ci : que notre corps étant composé et tenu en équilibre par le chaud, le froid, le sec et l’humide, notre âme est le rapport de ces principes entre eux, et l’harmonie qui résulte de l’exactitude et de la justesse de leur combinaison. » Aristote s’exprime de même à ce sujet : « On dit que l’âme est une harmonie ; l’harmonie, ajoute-t-on, est un mélange et un composé de contraires, et le corps se compose aussi de contraires. » Il n’est pas