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LE GÉNÉRAL BERTHELOT

pas contre vous, c’était contre moi que tout cela était dirigé. En tout cas, je n’ai pas confiance en Tannery. Et puis, il n’est pas intelligent. » J’essaie vainement de lui prouver que Tannery est un homme très intelligent et très sûr ; je me heurte à un de ces partis pris où tombe si facilement Clemenceau.

Louis Bertrand, candidat à l’Académie, me paraît tout à fait convaincu qu’il sera élu jeudi. Il se plaint des amis de Boylesve qui ont poussé celui-ci à se présenter, quoique plus jeune. Je jette un peu d’eau sur le feu.

Laroze, sous-gouverneur du Crédit foncier, candidat éventuel à la succession de Morel.

Lebey, député, croit la campagne pacifiste dangereuse ; il voudrait que Clemenceau se rapprochât des socialistes et en prît quelques-uns dans le ministère.


Samedi 11 mai.

Le général Berthelot, rentré en France après bien des péripéties, me dit que ce sont les défaillances de plusieurs hommes politiques roumains qui ont, autant que la défection russe, amené le lamentable traité de Bucarest. L’armée était devenue bonne.

Berthelot pense qu’il n’y a aucune confiance à faire aux bolcheviks, qu’il ne faut pas traiter avec eux, mais qu’il convient cependant de rester présent en Russie et d’y prendre des gages. Il croit qu’il suffirait de cinq ou six mille hommes de troupes alliées pour tenir tout le pays. Il a remis à ce sujet un rapport au Comité de Versailles. Il faudrait, du reste, ajoute-t-il, qu’on envoyât un officier général français pour que l’amiral anglais n’eût pas, comme il l’a, la prétention de tout commander.

Clemenceau m’ayant dit qu’il se proposait