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VOYAGE AUX ARMÉES

concorderait pas exactement avec le texte de la lettre impériale ; 4o que les hommes d’État français auraient donné leur parole d’honneur qu’ils ne feraient pas état de la lettre.

Le roi semblerait avoir engagé le prince à faire connaître publiquement ce manque de parole, ce qui dégagerait sa responsabilité. Le prince répugnerait à toute publicité, ne voulant prendre parti pour personne en cette affaire.


Dimanche 12 mai.

Départ à sept heures du matin par la gare du Nord. Temps triste et pluvieux. À Compiègne, très endommagé par le bombardement ; puis je suis reçu à la gare de Rethondes par le général Humbert et par le général de Salins, commandant la 38e division.

Pétain et Fayolle me rejoignent ensuite sur les points où je remets la fourragère au 4e régiment de marche des zouaves et au 1er régiment d’infanterie coloniale du Maroc. J’ai demandé que les cérémonies fussent réduites au minimum et qu’on ne dérangeât pas les troupes… Les hommes sont ravis de recevoir ces fourragères dont ils ont une grande et légitime fierté. Avant de les attacher au drapeau, je prononce chaque fois quelques mots de félicitations.

Je revois Tracy-le-Mont, Tracy-le-Val, si longtemps disputés et si violemment bombardés. Jusqu’à leur repli de l’an dernier, les Allemands venaient à deux cents mètres de Tracy-le-Val. Il nous reste aujourd’hui de ce côté, au nord de l’Oise, une petite zone qu’ils avaient occupée.

J’ai vu dans la journée des tombes de soldats français enterrés par l’ennemi avec des épitaphes en allemand, conçues en termes flatteurs : « A quinze héros français » ; « Ici reposent huit braves soldats français. »