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LA VICTOIRE

Clemenceau ajoute que si Milner et Haig sont venus le voir inopinément avant-hier, c’était pour se plaindre que Foch, après avoir enlevé aux Anglais quatre divisions américaines, ait voulu prendre également trois divisions anglaises du Nord et des batteries, et aussi pour se plaindre que Foch prenne des mesures de ce genre sans l’avertir, lui, Clemenceau. Dans la circonstance et d’accord avec Milner, Clemenceau a arbitré le différend en faveur de Haig. Mais qu’est-ce qu’un commandement en chef exercé avec de telles entraves ?

Le ministre de l’Uruguay me présente sa mission militaire, qui va partir pour le front.

Les officiers de liaison m’apprennent que le général Humbert espère contenir l’ennemi demain. Mais le radio allemand annonce déjà 8 000 prisonniers et le commandant Challe trouve que les journaux pacifistes et l’accord sur les prisonniers abaissent le moral des troupes. Il va falloir que je renouvelle auprès de Clemenceau mes observations quotidiennes. Il me répondra comme toujours : « Pourquoi lisez-vous les journaux ? Ils n’ont aucune importance. »


Mardi 11 juin.

Conseil des ministres. Clemenceau garde le silence sur les mesures qu’il a prises contre certains généraux. Il ne parle pas davantage d’autre chose. Il est muet.

Pichon lit quelques télégrammes. Il indique que le comité national tchèque a demandé à l’Angleterre et à la France de le reconnaître comme gouvernement. Pichon est d’avis qu’il y a lieu de donner une réponse favorable.

J’objecte à contre-cœur qu’il est peut-être difficile de reconnaître comme gouvernement un comité qui ne gouverne rien et qui n’a encore