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LA VICTOIRE

Clemenceau aux commissions parlementaires.

Angoulvant, nommé gouverneur général de l’Afrique occidentale et équatoriale, m’affirme que Clemenceau est en partie revenu de ses illusions sur la possibilité d’y recruter cent mille noirs. On aura, croit-il, grand mal à en trouver 40 ou 50 000. La mission confiée à M. Diagne compliquera les choses, au lieu de les faciliter. Henri Simon n’a pris l’avis de personne, sauf de Clemenceau, avant d’investir Diagne de ce large et périlleux mandat. Tel est, du moins, le sentiment d’Angoulevant.

Charles Benoist me raconte que les amis de Caillaux à la Chambre vont répétant qu’il y a un projet de concordat écrit de ma main et que les télégrammes secrets du ministère de l’Intérieur contiennent des renseignements pleins d’horreur.

Antonin Dubost m’apporte une nouvelle lettre du général Micheler, de plus en plus sévère à l’égard de Pétain et du Comité de Versailles.

Justin Godart vient m’expliquer un incident qui s’est passé hier à la Chambre. Tournade devait l’interpeller sur une affaire de faux médecin soumise à l’instruction. Justin Godart a demandé l’ajournement et s’est trouvé, dit-il, en face d’une petite conspiration dirigée contre lui. Il la croit imaginée, non pas certes par Clemenceau, mais par deux hommes de son entourage, Mandel et Lallemand, envahissants et agités. Clemenceau, a paraît-il, accepté en principe la démission de Godart, mais celui-ci, qui a donné l’exemple du travail et qui a conquis des sympathies générales, aurait consenti à rester sur un simple mot de bienveillance du Tigre.

L’après-midi, je vais visiter, avenue Malakoff, le musée de la Guerre, organisé par M. et Mme Leblanc, collection fort intéressante de livres et de gravures qui concernent la guerre.