Page:Potier de Courcy - Nobiliaire et armorial de Bretagne, 1890, tome 3.djvu/290

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ET DES USURPATIONS NOBILIAIRES 277

de Yépée ; cela est vrai, et l’on doit ajouler qu’elles n’ont jamais ete accordees spontanément par le souverain, mais qu’elles ont toujours 616 sollicitées. A l’exception du titre de Due, les autres n’ajoutaient rien aux prerogatives du simple gentilhomme.

Dans le principe, la noblesse s’est acquise tacitement et par le seul usage ; elle etait etablie depuis longtemps ainsi, lorsque les rois se sont charges de la rSglementer et se sont attribue le droit de la conferer. Dans le principe aussi, les principales terres seigneuriales ont 6té titles par Tusage, et le fait seul de leur possession en donnait le titre k leur proprietaire. De mftme que la noblesse immimoriale, nommee aussi noblesse de chevalerie, de nom et d’armes ou dancienne extraction, a plutdt gagneque perdu en valeur aprfes Tinnovation des anoblissements par lettres patentes, les terre3 titrees par l’usage anterieurement aux premiferes Erections du souverain, ont conserve toutes leurs dignites. On trouve bien peu directions de terres titrées, dflment enregistrees, avant la fln du XVI" sifecle ; et dfes le commencement du sifccle suivant, les usurpations etaient déj k frequentes, ainsi qu on peut l’interer de ces doléances de Pierre d’Hozier, juge d’armes de Prance. « II y aplusieurs en cette province qui s’attribuent sans tiltre legitime ces qualitez de Marquis et Comtes : mais ii ne s’en trouve rien dans les registres du parlement, fors des deffences k plusieurs modernes de ne prendre les dittes qualitez, que quantity de perSonnes abusivement portent aujourd’hui par toute la France, sans autre droit et fondement que parte que leurs valets les appellent ainsi 1 . » Avons-nous change depuis, et cette phrase n’a-t-elle pas Fair d’etre ecrite hier ? Au sifecle suivant, le due de Saint-Simon ne peint pas moins le travers de son temps, quand il s’ecrie : « II est vrai que les titres de Comtes etde Marquis suattombés dans la poussifere par la quantite de gens de rien et mfirae sans terres qui les usurpent, et par la tombes dans le neant : si bien mftme que les gens de qualite qui sont Marquis ou Comtes, qu’ils me permettent de le dire, ont le ridicule d’etre blessés qu’on leur donne ces titres, en parlant a eux. » Le desordre n’a fait que croltre depuis, et Ton peut dire que les titres ne Sont plus qu’au porteur ; mais personne ne se trouve aujourd’hui blesse de recevoir des appellations honoriflques non justifiees. Nous nous associons done pleinement k la pensee de M. le Garde des Sceaux, dans son rapport k TEmpereur ; mais e’est une bien faible digue contre le debordement des titres de contrebande, que le retablissement de l’article 259 du code penal, qui, nous le craignons, ne sera pas plus execute qu’avant son abrogation. II y a sans doute aussi loin d’un chevalier de la Légion d’Honneur k un chevalier banneret, que d’un Comte k majorat k un Comte d’Anjou, de Champagne ou de Toulouse ; cependant, quelque reduite que soit la valeur des decorations et des titres, ces decorations et ces titres exercent encore un curtain prestige sur les masses ; mais le code penal, en reunissant dans un article unique (259) le port illegal d’un uniforme oud’une decoration etcelui d’unnom ou d’un titre, vient detruire ensuite k l’application l’assimilation etablie entre ces deiits. En effet, la croix de la Legion d’Honneur, glorieusement gagnee par un pfcre

  • Recueil armorial de Bretagne, par le sieur d’Hozier, 1036.