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le tour du saguenay

La pêche à la ouananiche est un art qu’il n’est pas donné à tout le monde de posséder. Ne pêche pas la ouananiche qui veut. Il faut être doué d’une habileté peu commune doublée d’un sang-froid de marin. La ouananiche est un poisson qui se bat superbement et quand il se sent pris il se lance à cinq ou six pieds dans l’air avec une vigueur extraordinaire à tel point que le plus sûr moyen de le capturer c’est de l’amener à se jeter lui-même dans l’embarcation. Autrement on peut prendre une heure à le noyer.

La ouananiche est à la vérité assez peu connue parce que les endroits où on peut la pêcher sont plutôt rares. C’est un poisson de luxe. Il n’existe, à bien dire, que dans les eaux du lac Saint-Jean et dans celles du lac Sotagama — Tchitogama — situé à soixante milles de Chicoutimi. En passant, disons que c’est à cet endroit que les aéronautes américains Post et Hawley, partis en ballon de Saint-Louis, Missouri, furent obligés d’atterrir au fort d’une tempête de neige, le 29 octobre, 1910. Sans l’aide de chasseurs indiens montagnais qui les trouvèrent et qui les ramenèrent à la civilisation, ils auraient trouvé une mort affreuse en cet endroit sauvage.

D’après Montpetit, dans ses Poissons d’eau douce, la ouananiche existerait dans presque tous les lacs du Labrador : mais, comme ces lacs ne sont pas d’accès facile, la ouananiche y existerait-elle par bancs, que sa capture nous intéresserait guère. M. J. Guay, de Chicoutimi, un pêcheur de grande expérience, assure qu’il se trouve de la ouananiche dans une rivière du continent africain ; chose curieuse, ce serait la même que celle du lac Saint-Jean.