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Page:Potvin - Sous le signe du quartz, 1940.djvu/116

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ce matin même, à Ville-Marie et je dois partitr demain matin dans ce canot. »

L’Ontarien parut consterné ; on crut qu’il allait abandonner la partie mais il se ravisa et, scandant ses mots :

« C’est urgent… et nous comptons sur vous, M. Dumoulin… Je comprends votre douleur, mais je vous sais un homme de devoir et d’humanité. Je vous affirme qu’il y a là-bas, des hommes que vous pouvez empêcher de souffrir de la faim… Ils n’ont absolument rien et nous attendent demain soir avec des provisions… »

— Mais… mon fils ?… fit Dumoulin éclatant en sanglots.

— Et nos hommes, là-bas ? riposta le chef des prospecteurs, froid, énergique.

Il y eut quelques minutes d’un silence profond pendant lequel, malgré les grondements du rapide, on eut pu entendre battre les cœurs dans les poitrines. Tous les hommes du campement s’étaient approchés et haletaient sous l’émotion. On fixait Dumoulin toujours affalé sur sa grume rugueuse.

Enfin, il se leva lentement, la tête penchée, s’essuyant les yeux du revers de ses rudes mains, puis, rejetant le long de son corps las, ses longs bras noueux, il dit simplement au chef des prospecteurs :

« Enfin, monsieur, puisqu’il l’faut… demain matin, à quatre heures… »