Page:Quincey - Souvenirs autobiographiques du mangeur d’opium, trad. Savine, 1903.djvu/263

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
240
SOUVENIRS AUTOBIOGRAPHIQUES

tremblement de terre, ou tout au moins qu’elle avait disparu d’une manière ou d’une autre. Si cette histoire s’était trouvée vraie, elle aurait annoncé la disparition d’une jolie arche de verdure, élevée par Pink au souvenir des sentiments qu’il avait éprouvés tout jeune, envers de Foe, ou du personnage que son imagination avait créé, Robinson Crusoé, — ou plutôt envers un personnage en chair et en os, Alexandre Selkirk ; car ce monument avait été construit à l’endroit connu ou désigné par la tradition comme étant un de ceux qu’habitait de préférence Selkirk.

J’ai dit : ou plutôt Alexandre Selkirk, car on éprouve quelque difficulté intellectuelle à associer l’image de Robinson Crusoé à celle de cette charmante île du Pacifique, et au point de vue de l’imagination, la difficulté est encore plus grande. Il est difficile de dire pourquoi, à moins qu’il n’ait eu l’intention formelle de donner un démenti à la réalité, pourquoi de Foe a jugé à propos de placer la scène du naufrage de Robinson Crusoé sur la côte orientale du continent américain. Or cela n’est pas seulement en opposition directe avec les détails de l’événement qui lui a servi de base, tels qu’ils ont été rapportés, à ce que je crois, par Woodes Rogers, d’après le livre de loch du Duc et Duchesse, (corsaire qui, si je m’en souviens bien, avait été armé par les négociants de Bristol, deux ou trois ans avant le traité d’Utrecht) il résultait une incertitude, fâcheuse pour l’esprit de quiconque était au courant des faits, de cette idée de vouloir rattacher un naufrage accompli à l’orient, à une île située à l’occident. Mais il se dressait un autre obstacle plus embarrassant, parce qu’il était d’ordre moral, consistant en ce que nous