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LE MIROIR DES HEURES 77


Me voici désormais prisonnier de la page

Où quelque peintre de l’Iran

A, fraîche des pinceaux, enfermé mon image

Dans la marge et l’encadrement.


Mais qu’importe à mon cœur de prince magnanime

Qui sait les pièges du Destin

Et qu’au regard d’Allah tout mortel est infime,

Cet exil en pays lointain,


Puisque dans la prison de papier qui m’enserre

Je suis toujours noble à vos yeux

Et que mon gros rubis, de son feu solitaire,

Empourpre mon turban soyeux,


Puisque je monte encor mon bel étalon rose,

Que mon faucon, comme autrefois.

Peut, du haut de mon poing où sa patte se pose.

Becqueter l’œillet à mes doigts,


Puisque mon sabre courbe, au velours qui l’engaine,

Pend toujours de mon ceinturon

Et que je porte encore, à ma selle indienne

Accroché, mon bouclier rond,