Page:Régnier Double maîtresse 1900.djvu/182

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
182
LA DOUBLE MAÎTRESSE

neige, ni la boue, ni aucune intempérie. Il restait imperturbable à la saison et, d’après elle, réchauffé ou rafraîchi par son égale bonne humeur.

Ses collègues des Inscriptions l’estimaient pour cette heureuse disposition, et les amateurs prenaient plaisir à voir dans leur cabinet sa figure s’éclairer à la vue de quelque pièce rare dont il savait vanter, mieux qu’eux-mêmes, le mérite et le prix. Il se connaissait particulièrement en médailles. Sa main semblait réjouie d’en toucher le beau métal numismatique. Il faisait bon le voir, pour en mieux apprécier le relief, pencher sa grosse tête sur sa paume ouverte et courber le dos avec respect et curiosité. Il en possédait lui-même d’assez bonnes et en grand nombre, mais le fait qu’elles lui appartinssent ne lui faisait leur attribuer aucune valeur particulière, sinon celle due strictement à leur perfection ou à leur singularité.

L’abbé Hubertet avait vieilli depuis l’époque où, de Pont-aux-Belles, il partit pour l’Italie à la suite de son évêque. Pendant que M. de la Grangère intriguait aux antichambres et aux sacristies, prêt à mener à bien les affaires du roi dès qu’il aurait assuré les siennes, l’abbé se donnait du bon temps. Il visitait Rome en tous sens. Il s’y lia avec les principaux amateurs d’antiques.

M. Hubertet put ainsi en réunir un assez bon nombre. Mais tout finit, et il fallut revenir. On partit. Rome disparut à l’horizon. M. Hubertet en emportait un grand souvenir. Elle lui apparaissait, avec ses dômes et ses clochers, au milieu de