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LA DOUBLE MAÎTRESSE

assise que j’ai découverte et qui se trouve maintenant au cabinet du roi. Allez la voir, Monsieur, ce fut ma seule maîtresse. »

L’abbé Hubertet s’interrompit. On l’écoutait attentivement. Le petit chat blanc de Mlle Damberville, qui s’était glissé dans la salle, sauta sur la table. Il rôda un instant, puis s’assit sur son derrière, se lécha la patte et se la passa trois fois sur le nez.

— « C’est ainsi, Monsieur, dit encore l’abbé, que j’attendais la vieillesse. Elle est venue ; je la désirais. Pendant de longues années j’ai mis mes sens à une dure servitude. Maintenant, je ne redoute plus leurs écarts. Ils ne me demandent pas assez pour que j’hésite à les satisfaire. C’est pourquoi j’ai peut-être, à vos yeux, l’air de m’y abandonner. Il n’en est rien, Monsieur. J’use d’un droit légitime. Fanchon en est un des bénéfices. Mlle Damberville un autre, car n’est-ce pas un privilège de mon âge de jouir en paix les grâces du leur ? »

L’abbé Hubertet avait beaucoup parlé. Sa grosse figure suait à grosses gouttes. D’ailleurs la chaleur devenait extrême dans la salle close. On entendait parfois aux deux bouts l’eau des fontaines retomber dans les vasques avec un murmure alternatif.

— « Vous devriez bien vous régler sur l’abbé, monsieur Garonard, dit malicieusement M. de Clairsilly au peintre. Sa retenue vous serait un exemple à suivre. »

Et M. de Clairsilly se mit à raconter comment M. Garonard avait voulu, sans façon, brusquer