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nono

jeune duchesse qui respirait son bouquet. Renée avait enlevé son voile, et, en cache-peigne, d’une manière distraite, elle avait posé la couronne conquise.

Et ses cheveux nuageaient, tout autour, impalpables, souples, pareils à un rayon de soleil filé.

Un groom venait d’apporter le manteau d’hermine. Le duc le lui avait attaché pour qu’elle ne sentît pas la fraîcheur des arbustes entassés auprès d’elle. Une tendresse soumise se lisait au fond des yeux d’Edmond de Pluncey, de ses yeux déjà fatigués de lumière et qui rêvaient la voluptueuse obscurité de leur chambre nuptiale.

— Oui, bientôt, murmura Renée avec un frisson.

— Plus tôt que vous ne le désirez, je comprends, reprit douloureusement le duc. Sera-ce donc toujours la même froideur dans votre corps de marbre ? Le même glaçon dans votre sein neigeux ?… et le même poignard dans ma plaie ?

» Renée, la couronne qui brille sur votre tête ne m’appartient plus à partir d’aujourd’hui ; mais je vais, en échange, dérouler vos cheveux…, ce soir !

» Me suis-je appelé le duc de Pluncey ?… peut-être ! En retour je vous nommerai simplement Renée… cela chaque jour, chaque nuit !…

» Ai-je été un homme honorable, un partisan des bonnes causes, un duelliste heureux, un amant aimé ?… Je l’ignore. Mais, je vais être votre mari, celui qui a le droit de draper un manteau sur votre gorge délicate, celui qui a le droit d’effleurer votre peau satinée…