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naient des guirlandes et elle vit des barreaux de fer, et une voûte souillée de moisissure. Le lit d’ébène soutenu par des cariatides de bronze était au fond de la pièce, et derrière son dais de brocard à blasons constellés un grabat lui apparut où le corps de Nono grelottait par cette nuit glaciale.

— Ah ! laissez-moi, je vous hais ! » cria-t-elle avec angoisse quand son mari s’approcha d’elle. Elle fut une minute sans pouvoir articuler un son. Le duc attendait debout. On ne percevait que le bruit de leurs respirations sifflantes.

— Avant de m’abaisser à un soupçon ignominieux, dit enfin M. de Pluncey, je désire savoir, Renée, quelle est au juste l’accusation qui pèse sur ce Bruno Maldas. Victorien Barthelme est-il vraiment venu à Tourtoiranne, une nuit, il y a six mois !

— Oui, répondit Renée très bas, il y est venu.

— Ah ! »

Un second silence se fit.

Le duc s’appuya sur le dossier de la chaise.

— Je devine, ne parlez-pas, Renée. Victorien a été tué par ce garçon qui vous aimait. Est-ce tout ? j’ose le croire, mais j’ai résolu d’endurer toutes les hontes ! Vous avez eu un amant, des amants peut-être ; moi, votre mari, je vous pardonne !… »

Elle releva le front. En même temps que les mots tombaient lentement des lèvres du duc, une rougeur fugitive glissait sur ses tempes ; cet homme avait l’air d’agoniser dans les spasmes d’un désir furieux.

— Non, vous vous trompez, dit Renée en reculant.