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si fin et si pur. Alors, Bruno eut devant lui l’assassin de Barthelme, tel qu’il devait être pendant le crime. Réellement cette femme avait tué ! Elle avait envie de tuer encore !

— Que ne puis-je déchirer ce monstre plus monstre que moi… Il m’a trahie… il est venu me reprendre ton amour… lui qui avait promis de te sauver !… et ses dents apparurent entre ses deux lèvres pourprées.

— Savez-vous prier ? demanda Bruno lentement, j’ai essayé, je n’ai pas pu… je ne peux que vous pardonner.

— Je refuse ton pardon… puisqu’il est sans baiser !… » répliqua-t-elle se cachant le front dans le velours de sa jupe.

Bruno rampa jusqu’à sa couche.

— Madame… l’heure n’est pas arrivée… demain, quand les jurés auront prononcé, vous serez plus sûre de ma fin.

Renée bondit.

— De ta fin, rugit-elle, en l’enlaçant de ses bras, que dis-tu ? ne comprends-tu pas que je reste… et que tu peux sortir. Je ne suis pas folle, ils le verront bien, va !… Comme ton corps est froid !… comme tes yeux sont brillants… Ne devines-tu pas maintenant ce qui m’éloignait de ta tendresse ? Écoute… écoute donc… j’étais venue décidée à me taire encore parce que je voulais me donner toute… Il me semblait que je me devais et que tu m’étais dû… j’ai trop souffert ! Notre amour a été assez chaste pour me racheter… n’est-ce pas ?… oh ! mon vierge adorable !…