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plus terribles. Mlle Fayor, voyant courir cette chienne, se mit à courir aussi en se bouchant les oreilles des deux mains, ayant peur maintenant de l’entendre hurler.

Arrivée près du château, elle examina les croisées, aucune n’était ouverte. Cependant, là-haut, Bruno Maldas veillait encore, car une ombre passa contre une vitre dans la clarté d’une bougie. Renée repoussa la porte dérobée, monta l’escalier, rentra chez elle et s’enferma à double tour. On l’avait vue, certainement, et elle se sentait plus tranquille puisqu’elle serait punie.

Elle alla s’étendre, tout habillée, sur le blason brodé de son lit noir. L’amour de marbre, grave et triste, tenait sa lampe éteinte. À présent il ne cherchait plus l’homme !

— Faut-il me laisser traîner devant les tribunaux songeait-elle, ou faut-il prévenir le scandale d’une cour d’assises en me suicidant ?

La figure souffrante de sa mère lui souriait, entourée de brouillards et à côté, la panoplie montrait des armes faites à la délicatesse de ses doigts, mais sûres, effilées. Elle hésita, et, saisie d’une lâcheté morale qui envahit tout son être, elle haussa les épaules.

— Non, fit-elle, attendons ! »

Elle songeait peut-être qu’on pourrait acheter Bruno. Elle se persuadait de plus en plus qu’il avait vu…, c’était fatal…, cela devait être !

Elle se releva, courut à son bureau, secouée par une fièvre intense. Elle alluma une bougie, se mit à brûler les lettres rendues, cacheta des papiers, scella