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nono

cune tristesse ne vous viendra de moi…, jamais, je vous le jure… je……

Il s’arrêta, et se remit à pleurer. Il se coucha de bonne heure, ivre, désespéré, s’enfonçant la tête dans le traversin, ne voulant plus se souvenir. Finalement, il s’endormit, fatigué de ses sanglots.

Dans le désordre de son lit auquel il communiquait sa fièvre, Nono laissa pendre son bras hors de ses couvertures. Le lendemain, lorsqu’il s’éveilla, il éprouva une sensation étrange au poignet. C’était un chatouillement très doux, d’une douceur fraîche. Des petites choses délicates roulaient le long de sa peau. Il portait des chemises de toile énorme, raccommodées grossièrement ; aussi ce contact faillit le rendre fou avant même qu’il eût vu ce qui le produisait. Il s’éveilla tout à fait, et ramena son bras. Ses yeux s’agrandirent dans une stupeur immense : il y avait autour de son poignet un fil de perles à fermoir d’or, d’une valeur au moins égale à celui qu’il avait voulu acheter chez le bijoutier parisien.

Nono sauta du lit et se précipita sur sa lettre commencée ; elle était toujours à sa place… la lettre de Lilie, le papier vert tout était là.

Il se toucha, se palpa, retoucha, repalpa le collier. Il était bien en vie ! C’était bien des perles !

Nono crut à un miracle. Ensuite, il pensa au général. Pourtant, ce ne pouvait être ni la sainte Vierge, il ne se reconnaissait pas assez pieux, ni le bourru, il n’était pas assez bienfaisant. Son esprit travailla