Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mère, et, d’une voix brisée, il dit au milieu des singes :

« Qu’ai-je à faire maintenant de Sîtâ, de Lankâ ou même de la vie, moi, qui, à cette heure, vois Lakshmana aux signes heureux couché parmi les morts ? Je puis trouver ailleurs une épouse, un fils et même d’autres parents ; mais je ne vois pas un lieu où je puisse obtenir de nouveau un frère consanguin. « Indra fait pleuvoir tous les biens ; » c’est une parole des Védas ; « mais il ne fait pas qu’il nous pleuve un frère ! » c’est un adage qui n’est pas moins vrai. Soumitrâ est ma mère par son hymen avec mon père, et Kâauçalyâ est celle qui m’a donné le jour. Mais je ne fais aucune différence entre elles pour l’autorité d’une mère. »

Dans ce même instant, le Vent s’approcha du héros gisant et lui souffla ces mots à l’oreille : « Râma ! Râma aux longs bras, souviens-toi dans ton cœur de toi-même. Tu es Nârâyana le bienheureux, incarné dans ce monde pour le sauver des Rakshasas : rappelle-toi seulement le fils de Vinatâ, ce divin Garouda, à l’immense vigueur, qui dévore les serpents ! Et soudain il viendra ici vous dégager l’un et l’autre de cet affreux lien, dont vous ont enchaîné des serpents sous les apparences de flèches. »

Râma, les délices de Raghou, entendit ce langage du Vent et pensa au céleste Garouda, la terreur des serpents. Au même instant, il s’élève un vent impétueux avec des nuages accompagnés d’éclairs. L’eau de la mer est bouleversée, les montagnes sont ébranlées ; tous les arbres nés sur le rivage sont brisés, arrachés avec les racines et renversés de mille manières dans les ondes salées au seul vent des ailes de l’invincible oiseau. Les serpents de la terre et les reptiles, habitants des eaux, tremblent d’épouvante.