Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/320

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

dans l’attaque, on déterroit ſon cadavre on le mutiloit, on le faiſoit paſſer par tous les genres de ſupplice qu’on eût voulu raſſembler ſur l’homme vivant. L’horreur qu’on avoit pour les Flibuſtiers s’étendoit ſur les endroits même qu’ils avoient ſouillés de carnage. On excommunioit les villes qu’ils avoient priſes ; on dévouoit à l’anathème les murailles & le ſol des places dévaſtées, & les habitans les abandonnoient pour toujours.

Cette rage impuiſſante & puérile ne pouvoit qu’enhardir celle de leurs ennemis. Lorſqu’ils prenoient une ville, elle étoit livrée aux flammes, à moins qu’on ne leur payât une contribution proportionnée à ce qu’elle pouvoit valoir. Les priſonniers qu’ils faiſoient étoient maſſacrés ſans pitié, ſi le gouvernement ou les particuliers ne les rachetoient. Ils n’acceptoient pour rançon que de l’or, des perles ou des pierreries. L’argent trop commun, trop peſant pour ſa valeur, les auroit embarraſſés. Enfin le ſort, dont les viciſſitudes laiſſent rarement le crime ſans punition, & les malheurs ſans dédommagement expia la conquête du Nouveau-Monde,