Page:Reclus - L’Avenir de nos enfants.djvu/4

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Mais au-dessous de l’homme fait, quelque malheureux qu’il soit, il est un être plus malheureux encore, c’est l’enfant. Cet être faible n’a point de droits et dépend du caprice, bienveillant ou cruel. Rien ne le protège contre la sottise, l’indifférence ou la perversité de ceux qui en sont les maîtres. Qui poussera donc en sa faveur le cri de liberté ?

Dans la société actuelle, toute autorité s’exerce de maître à esclave suivant une série logique. Dieu règne en haut, trônant par delà des cieux et déléguant ses pouvoirs sur la terre au plus fort, prêtre ou roi, Hildebrand ou Bismarck. Au-dessous viennent des satrapes de tous noms, gouverneurs et sous-gouverneurs, présidents et vice-présidents, généraux et capitaines, maîtres et sous-maîtres, tous courbant l’échine devant un supérieur, tous se gonflant la poitrine d’orgueil devant des sujets : d’un côté l’adoration, de l’autre le mépris, ici le commandement, là l’obéissance ! Depuis Jacob on n’a rien trouvé de mieux, la société n’est qu’une série d’échelons descendant de Dieu jusqu’à l’esclave et se continuant jusque dans les enfers. Les géhennes, les abîmes de tourments ne sont-ils pas le symbole de ce qu’ont à souffrir les vaincus et les faibles !

Et parmi ces faibles, ce sont les enfants qui sont les