Page:Reclus - Le Mariage tel qu’il fut et tel qu’il est.djvu/21

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plus courageusement et que plus douces soient leurs joies, moins amères leurs peines ;

Ceux-là se marient — mais non devant l’autorité civile, et s’abstiennent de tout contrat, serment ou instrument officiel.

Tout bien considéré, se disent-ils, nous ne débuterons pas dans la vie par un acte que notre conscience réprouve. Le mariage n’est-il vraiment qu’une coutume vieillie, mais pas encore démodée ? Certains l’assurent qui ont accepté le mariage officiel, sauf à hausser les épaules avant et après. — Eh bien ! nous nous dispenserons de cette inutile cérémonie. — Le mariage est-il, au contraire, comme nous le croyons, une réalité de premier ordre, qu’il serait insensé de traiter à la légère ? — Alors notre déclaration impliquerait que nous acceptons et le semblant de tyrannie et le semblant de servitude, deux semblants qui font une lâcheté. Car nous supposons comme démontrée l’entière et complète équivalence des deux facteurs de la famille. Il nous répugne et que la femme soit déclarée meuble conjugal, et que l’homme soit réputé le propriétaire d’un pareil objet.

— « C’est de l’idéologie ! », entendons-nous. Soit ! Mais il fait besoin que, de temps à autre, quelques-uns se renseignent au juste sur leurs droits et leurs devoirs ; qu’ils sortent de la fiction, et se cantonnent dans la réalité morale. Commençons par la vérité, puisque nous la désirons comme fin.

D’excellents amis, des parents aimés font valoir des raisons contraires, à peu près en ces termes :

— « L’intervention légale, passée dans l’habitude, détermine seule la légitimité et l’illégitimité des unions ; et qui s’en affranchit est réputé immoral. Cette intervention, il faut l’accepter, sauf à être confondus avec ceux qui tournent l’union sexuelle en incontinence. Ne courez donc pas en dératés sur la route du progrès ! Hier, on n’osait mourir sans se faire asperger d’eau sainte, on n’osait s’épouser sans la bénédiction du prêtre ; menons d’abord ces réformes-ci à bon point. Et bien que la législation actuelle laisse beaucoup à désirer, on ne peut nier qu’elle offre des garanties, des garanties nombreuses, dont voici les principales. Au mari, que l’épouse respectera la sainteté du foyer conjugal et tout au moins, n’affichera pas bruyamment son inconduite. À la femme, que