Page:Renan - Histoire des origines du christianisme - 4 Antechrist, Levy, 1873.djvu/304

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Les arbitres de la situation allaient naturellement être les exaltés. Le côté démocratique et révolutionnaire du judaïsme se manifestait en eux d’une façon effrayante. Ils étaient persuadés, avec Judas le Gaulonite, que tout pouvoir vient du mal, que la royauté est une œuvre de Satan (théorie que des souverains, tels que Caligula, Néron, vrais démons incarnés, ne justifiaient que trop), et ils se laissaient hacher plutôt que de donner à un autre que Dieu le nom de maître[1]. Imitateurs de Mattathias, le premier des zélotes, qui, voyant un Juif sacrifier aux idoles, le tua[2], ils vengeaient Dieu à coups de poignard. Le seul fait d’entendre un incirconcis parler de Dieu ou de la Loi leur suffisait pour qu’ils cherchassent à le surprendre seul ; alors ils lui donnaient le choix entre la circoncision ou la mort[3]. Exécuteurs de ces sentences mystérieuses qu’on abandonnait à « la main du ciel », et se croyant chargés de rendre effective cette peine redoutable de l’excommunication, qui équivalait à la mise hors la loi et à la mort[4], ils formaient une armée de terroristes, en pleine ébullition révolutionnaire. On pouvait prévoir

  1. Cf. Vie de Jésus, p. 62-64.
  2. I Macch., ii, 27.
  3. Philosophumena, IX, 26.
  4. Notez les formules נכרתה, קנאים פגעים בו, בידי שמים,