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dieux. Il en est tout autrement dans le judaïsme à l’époque des prophètes, et en général dans toutes les grandes religions organisées. Jéhova seul est Dieu ; tout le reste n’est qu’idole. De là l’idée d’une vraie religion, qui n’avait pas de sens dans les cultes mythologiques. Or, comme la vérité est conçue à ces époques comme une révélation de la Divinité, ce caractère se traduit en religion révélée (125).

Enfin les religions organisées se distinguent des cultes mythologiques par un plus grand caractère de fixité et de durée. Il est vrai à la lettre qu’aucune grande religion n’est morte jusqu’ici, et que les plus maltraitées, parsisme, samaritanisme, etc. vivent encore dans la croyance de quelque tribu ou reléguées dans quelque coin du globe.

Ainsi d’une part religions organisées, se posant comme révélées, absolues, exclusivement vraies, ayant un livre sacré. — De l’autre religions non organisées, locales, non exclusives, n’ayant pas de livre sacré.

Les grandes religions asiatiques se grouperaient elles-mêmes en trois familles, ou plutôt se rattacheraient à trois souches : 1° famille sémitique (judaïsme, christianisme, islamisme) ; 2° famille iranienne (parsisme, manichéisme) ; 3" famille indienne (brahmanisme, buddhisme). Dans l’intérieur de chaque famille, les réformes successives n’ont été que les développements d’un fond identique (126).

On ne peut dire rigoureusement que les religions soient une affaire de race, puisque des peuples indo-germaniques ont créé des religions tout aussi bien que les peuples sémitiques. On ne peut nier toutefois que les religions indo-germaniques n’aient un cachet à part. Il s’en faut peu que ce soient des philosophies pures. Buddha ne fut qu’un philosophe ; le brahmanisme n’a guère des religions organisées que le livre sacré, et n’est au fond que