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LES INSCRIPTIONS DE NAUCRATIS

Tsade Schin
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MM[1] ϟ et Σ

L’analogie extérieure entre ces trois Σ grecs a été cause, à ce qu’il me semble, que la question de leur origine graphique est restée longtemps mal éclaircie. Me fondant sur le dix-huitième signe de l’alphabet de Cære[2], que M. Gardner a également signalé dans une note, mais sans en tirer de conséquences[3], je me décide à mon tour à faire dériver le sigma à trois branches du tsade et non du schin. J’admets qu’à une époque ancienne, le ϟ et le Σ étaient employés indifféremment en pays ionien, et j’en vois des preuves dans l’inscription si primitive de la naxienne Nicandré[4], comme dans les fluctuations des inscriptions les plus anciennes d’Amorgos[5]. Plus tard, il se produisit une séparation des alphabets ioniens : les uns adoptèrent le sigma à trois branches — je les considère comme formant le groupe du tsadé, qui comprend Abou-Simboul, Téos, Colophon et la monnaie de Φάνης (Phanês) (?) ; les autres, le groupe du schin, représenté pour nous par l’alphabet de Milet, adopta le Σ. Au moment de la séparation, les alphabets ioniens possédaient déjà Φ, Χ, Ψ, mais non pas encore Ω. Cette lettre fut adoptée par le groupe du schin, au plus tard au viie siècle. Je crois que nous pouvons dire avec quelque assurance que la puissante cité de Milet fut la première à employer l’alphabet ionien complet et que c’est elle aussi qui en a répandu l’usage. Car, au vie siècle, d’après le témoignage des graffites de Naucratis, les hommes de Téos[6], de Chios[7], de Phocée[8], écrivaient dans l’alphabet milésien, devenu l’alphabet commun de l’Ionie. Raison

  1. Alphabet de Formello, dans les Imagines de Rœhl, p. 9, 16 ; alphabet d’un pinax corinthien, ibid., p. 20, 13.
  2. Inscriptiones antiquissimae, n° 534. = Imagines, p. 9, 17.
  3. Journal of hellenic Studies, t. VII, p. 235, note 1.
  4. Bulletin de Correspondance hellénique, t. III, pl. i, p. 4 ; Inscriptiones antiquissimae, n° 407 ; Imagines, p. 52, n° 1.
  5. Athenische Mittheilungen, t. XI, p. 97 ; Roberts, Greek epigraphy, t. I, p. 188 et suiv.
  6. Naucratis, t. II, nos 779, 876.
  7. Ibid., no  706.
  8. Ibid., t. I, no  666.