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Sans sortir de l’Italie, de Vico passons à la papauté. Depuis quelque temps, la papauté est l’objet de nombreux travaux littéraires. M. Hurter,-M. Léopold Ranke, se sont livrés à des investigations sérieuses sur le gouvernement des papes, et quoique ces écrivains n’aient pas toujours été impartiaux, la lumière a été faite sur beaucoup de points. A son tour, M. de Cherrier intervient et publie l’Histoire de la lutte des papes et des empereurs de la maison de Souabe. Ce livre commence à Frédéric Barberousse, et finit à Conradin. Le sujet est vaste, quoique l’auteur se soit imposé des limites ; il a une haute portée, car il ne s’agit de rien moins que de pénétrer, durant ces luttes mémorables et sanglantes, la pensée de l’église romaine et celle des empereurs, touchant cette nationalité italienne, encore en procès de nos jours. — Il ne faut pas chercher dans le livre de M. de Cherrier les brillantes peintures ; érudit et attentif, M. de Cherrier s’entend mieux à pénétrer les effets et les causes des évènemens qu’à prodiguer les vives couleurs. Ce qu’il entend le mieux après tout peut-être, c’est l’impartialité. Malgré ses sympathies pour la politique du saint-siège, il ne manque pas, lorsque les papes se laissent emporter par les passions humaines, de les reprendre avec énergie. Une telle bonne foi mérite de ne pas passer inaperçue, et il est juste d’appeler l’attention sur un ouvrage instructif qui rachète ce qui lui manque d’éclat et de profondeur à force d’honnêteté et de bon sens.

Aujourd’hui la papauté a changé de rôle ; elle a une autre mission. La logique enflammée du comte de Maistre, qui dévore tout ce qu’elle touche, et les fougueuses inconséquences de M. de Lamennais, n’ont pas été écoutées ; il y aura bien d’autres mécomptes. Je suis sûr pour aller du grand au petit, qu’on ne demanderait pas mieux que de faire descendre la papauté dans le débat actuel ; mais elle n’y descendra pas, et la lutte entre le clergé et l’état se poursuivra comme elle a commencé : Rome restera simple spectatrice. Du reste, cette question de l’enseignement, à peine au début, est singulièrement envenimée. Déjà les écrits de toute espèce, minces ou gros, honnêtes ou venimeux, hypocrites ou violens, se sont succédé coup sur coup. Nous ne mentons pas à notre vieille renommée la furia est toujours française. — Parmi les écrits qui plaident directement ou indirectement la cause de l’Université, un des plus consciencieux certainement est l’Histoire de l’Université de Paris, par M. Eugène Dubarle. A part l’intérêt du moment, ce livre offre une lecture des plus instructives. N’est-il pas intéressant et curieux d’aller de Ramus au bon Rollin en côtoyant les jésuites, d’arriver au rapport de M. de Talleyrand à l’assemblée nationale, et de passer avec M. de Fontanes à l’établissement de l’Université impériale ? Est-il indifférent de suivre cette pensée féconde de l’instruction primaire avec les deux hommes éminens de ce temps-ci qui ont le plus contribué à ses progrès, M. Royer Collard et M. Guizot ? — Le livre de M. Dubarle avait déjà paru sous la restauration c’est une sentinelle qu’on avait relevée et qui revient prendre son poste.

M. l’abbé Liautard est une autre sentinelle qu’on place dans la guérite opposée. Sous la restauration, il fût l’ennemi impatient et colère de l’Université,