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Fabrication française Fabrication étrangère
Tapis, pour 391,000 fr. 835,000 fr.
Draps 19,280,000 8,420,000
Casimirs et mérino. 5,693,000 4,124,000
Étoffes variées. 17,006,000 4,225,000
Bonneteries 2,069, 000 314,000
Étoffes mélangées 6,223,000 2,135,000
Châles 26,964,000 790,000

On voit par ce petit nombre d’articles que nos fabriques continuent à rivaliser pour l’excellence, mais que, pour les qualités moyennes, elles ont oublié les exigences des peuples éloignés et les traditions qui avaient mis nos ancêtres en possession exclusive des débouchés du Levant, alors les plus importuns.

Est-ce au manque de laines convenables à des prix modérés, est-ce à la mauvaise direction de nos fabriques qu’il faut attribuer la presque nullité des progrès faits depuis 1834 dans l’art des tapis ? Le plus vanté de ceux qui ont paru à l’exposition était bien médiocre de qualité et de bien mauvais goût pour le dessin. L’éclat, et non l’usage, c’est à quoi l’on s’attache, et nous nous rappelons les paroles consacrées par l’enquête de 1834 ; l’on réclamait la continuation de la prohibition des tapis de Turquie, et l’on disait : « On les recherche, car ils sont bons, chauds et peu chers. » Hélas ! nous n’avons pas vu à l’exposition de 1844 des tapis qui eussent ces qualités.

Dans l’industrie des châles, la France n’a point de rivale ; c’est là un de ces tissus dont un goût délicat peut seul perpétuer la mode en le variant avec habileté. Aussi notre exportation de châles, après avoir été de 8 millions en 1841 et de 10 millions en 1842, est-elle arrivée à dépasser celle des draps, presque stationnaire ou même rétrograde depuis trois ans.

L’industrie du. lin et du chanvre, qui touche de si près à tous nos emplois domestiques, a les plus grandes peines à se naturaliser en France depuis qu’elle est généralement sortie des mains de la famille pour entrer dans la classe des manufactures. Le rouet de la bonne femme et le modeste métier du tisserand cultivateur sont à la veille d’être voués à l’inaction la plus absolue. Le progrès des arts a troublé le dernier refuge de la pauvreté, et la France, à qui est due la découverte de la filature mécanique, n’a pas encore pu la mettre à profit d’une manière assez complète pour se passer de ses rivaux. Depuis long-temps le sol fertile de la Belgique était en possession de nous fournir la toile qui nous manquait, et venait suppléer à une partie de