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ils provoquent les troubles ; loyalistes, ils poussent à une révolution. Leurs principes peuvent-ils justifier une telle conduite ? Les principes ne sont-ils pas indépendans de toutes les vicissitudes humaines, des changemens de dynasties et de personnes ? Sinon, à la merci de quels accidens ils varieraient ! Supposez que les Guise eussent montré plus de décision, les Bourbons ne seraient que les premiers gentilshommes de France. » Malgré ces paroles, M. Smythe ne conseillé pas assez vivement à cette partie de la noblesse d’abandonner une attitude si inconséquente. Il ne lui suggère pas les raisons vraiment politiques qui devraient la décider. On n’a pas assez remarqué, à mon avis, que si la révolution a enlevé à la grande noblesse des avantages de fortune et de vanité, nos institutions actuelles lui ouvrent une carrière bien digne de tenter les ambitions viriles, et qui lui était fermée autrefois. Sous l’ancienne monarchie, sous Louis XIV et même après lui ; il était plus facile à un homme de naissance, médiocre, ou même sans naissance, de devenir ministre et de gouverner qu’à un duc et pair. La grande noblesse pouvait bien se disputer les tabourets et les préséances, le conseil lui était fermé. Plus d’un grand seigneur a dû ressentir l’irritation frémissante de Saint-Simon contre cette politique de la royauté qui livrait les grandes affaires et le gouvernement à la roture ou à la petite robe. Que la douleur et presque la honte de cette exclusion devaient leur être poignantes, en présence de l’ironique dédain qu’elle inspirait à l’aristocratie britannique, devant ce sarcasme de lord Bolingbroke, par exemple, qui disait que notre noblesse n’était élevée qu’à faire l’amour, à chasser et à se battre ! Mais aujourd’hui, et c’est le contraste que j’aurais demandé à M. Smythe d’indiquer, l’activité publique, la véritable ambition politique, ne sont plus interdites à personne. Dans cette lutte ouverte à tous, chacun peut se servir de ses avantages naturels ; les membres des anciennes familles y emploieront quand ils le voudront ceux qui sont leur propriété inaliénable ; là ils pourront utilement et glorieusement déployer ces qualités de caractère que M. Smythe loue plusieurs grandes maisons d’avoir perpétuées en elles. M. Smythe aurait pu signaler ici comme enseignement un nom auquel il rend lui-même, parmi d’autres vivans exemples de l’hérédité des nobles mérites, un hommage spécial, le nom de celui qui, suivant ses expressions, « .a apporté dans la vie politique les vertus courageuses qui faisaient écrire d’un de ses ancêtres par le cardinal de Retz : « Si ce n’était pas une espèce de blasphème de dire qu’il y a quelqu’un dans notre siècle plus intrépide que le grand