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noncerait dans les termes les moins équivoques pour Talliance de TAllemaj entière avec les puissances occidentales.

A côté du mouvement de la presse, il y a toutefois un mouvement plus significatif encore : c'est celui des écrits de circonstance, des études souvent très sérieuses qui se multiplient sous l'influence des diverses complications de la crise. Parmi ces écrits, il n'en est presque aucun qui soit ouvertement favorable à Talliance russe; ceux qui soutiennent la neutralité de TAllemagne forment une petite minorité; la plupart réclament, dans un langage souvent empreint d'une véritable passion nationale, la participation la plus énergique à la guerre contre la Russie (1). Outre les brochures politiques proprement dites, on doit noter aussi des recherches savantes telles que celles de M. de Reden, qui prouve avec autorité combien peu les forces matérielles et morales de la Russie répondent aux vastes projets de sa politique. C'est ce curieux mouvement d'écrits dont il serait opportun peut-être de montrer les directions principales d'après les travaux les plus notables qu'il a provoqués.

Les deux grandes puissances de l'Allemagne représentent en quelque soi'te deux groupes flottans dans cet immense courant d'idées. On ne tient pas assez compte de la constitution politique de ce pays, de ce système fédéral qui, à la satisfaction des autres grandes puissances de l'Europe, présente tous les avantages d'un corps poh tique désuni et par conséquent moins dangereux, et qui laisse néanmoins subir à l'Allemagne toutes les exigences qui pèsent d'ordinaire sur les états dirigés par un seul gouvernement. Sans les obstacles de tout genre qui, depuis le traité de Westphalie jusqu'à la destruction du grand empire germanique, s'opposèrent au développement unitaire de l'Allemagne, il y aurait en ce moment peut-être au-delà du Rhin un ensemble d'intérêts communs, qui seraient la barrière naturelle de l'Occident contre la politique envahissante de la Russie. La France et l'Angleterre, si favorables au rétablissement de la Pologne, rêvé par des esprits plus généreux que pratiques, n'ont-elles pas elles-mêmes agi contre la formation d'uii_ meilleur équilibre des forces germaniques? Quoi qu'il en soit, nous n'i vous à considérer ici les populations allemandes que dans leur attitu( vis-à-vis de la Russie, et la crainte que celle-ci leur inspire ne laisse aucune place à d'anciens ressentimens. L'Allemagne aime à se rappeler ce qu'elle a fait pour arrêter les empiètemens de la Russie. N'a-t-elle pas multiplié de persévérans efforts i>our étendre l'élément germanique, surtout dans les (1) Ces écrits ne se prêtent guère pour la plupart à l'analyse, et quelques titres nous nous bornerons à citer indiquent suffisamment sur quels points se porte le pli volontiers l'attention publique. Voici ces titres : le Théâtre de la Guerre turco-russe;

— les Résultats de la première année de la guerre; — de la Politique russe et de la Neutralité allemande; — la Réponse allemande à la Question orientale; — la Guerre turco-russe en Europe et en Asie; — le Péril dans l'état de l'Europe; — la Politique anglo- française dans la Question orientale; — Schamyl comme guerrier, sultan et prophète; — les Principaux personnages sur le théâtre de la guerre russo-turque; — la Guerre turco-russe dans les années 1828 et 1829, par M. le capitaine Junck; —la Question brûlante de l'Europe; — la Question orientale dans son développement historique, par le professeur Roeppel; — l'État social de la Russie, par M. Hertzen;— la Russie et l'Angleterre, par M. Bruno Bauer, etc.