Page:Revue des Deux Mondes - 1854 - tome 8.djvu/601

La bibliothèque libre.
Aller à la navigation Aller à la recherche
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’est la bonne intention manifestée avec persévérance par le pape de réorganiser et de régulariser l’administration et les finances romaines. Récemment encore, diverses mesures attestaient cette volonté d’arriver à des améliorations pratiques et réellement utiles. L’une de ces mesures avait pour but de retirer de la circulation le papier-monnaie, qui depuis 1848 est un élément de perturbation pour le commerce romain. Deux jours par semaine ont été fixés pour l’échange des bons contre leur valeur en numéraire à la caisse du trésor. Cette mesure a reçu à peine un commencement d’exécution, qu’elle a produit les plus heureux effets. Le gouvernement modifiait en même temps le système d’administration des tabacs et du sel, en plaçant cette source de revenu sous la direction immédiate de l’état à l’expiration du bail par lequel elle est actuellement entre les mains de l’industrie privée. Une société en commandite est formée pour la mise en œuvre du système nouveau, de telle sorte que le public se trouve appelé à participer aux bénéfices prévus de l’administration reconstituée. Ces différentes mesures peuvent avoir sans nul doute une influence utile, malgré ce que peut présenter de dangers le système de régie adopté pour le sel et les tabacs. Il est malheureusement difficile de rattacher au même ordre d’idées un autre acte par lequel le gouvernement élève à une taxe démesurée le tarif d’importation des denrées coloniales et impose un droit d’exercice au débitant en détail. Quel peut être le but de cette aggravation de tarifs ? Si l’on a pensé augmenter les recettes de l’état, il n’est point impossible que le résultat ne soit entièrement contraire à l’intention. La contrebande tout au plus y gagnera en devenant plus active et en s’organisant sur une plus vaste échelle ; nous ne parlons pas des mécontentemens qui peuvent se produire. Rome a pu ainsi s’occuper pendant quelques jours de finances et de droits de douanes ; mais déjà la réunion des prélats convoqués par le pape pour une question de dogme religieux lui a rendu le caractère qui fait de Rome un pays si différent de tous les autres.

L’Espagne, pour sa part, ne cesse point d’offrir le spectacle prolongé de ses incertitudes et de ses confuses agitations. C’est une mêlée qui dure depuis trois mois, et à travers tout cela les intérêts sérieux et réels du pays deviennent ce qu’ils peuvent. Il n’y a qu’une pensée aujourd’hui au-delà des Pyrénées : c’est d’arriver au 8 novembre, jour de la réunion des cortès, sans secousse nouvelle, et on ne sait point si on y arrivera. Pour le moment, l’Espagne se trouve entre une assemblée politique à peine sortie du scrutin, dont l’esprit est inconnu, et un gouvernement qui a bien du mal à s’entendre sur les plus simples mesures. Ce sont là les deux traits les plus caractéristiques de la situation actuelle de la Péninsule. Que peut-on augurer des élections qui viennent d’avoir lieu ? Il serait d’autant plus difficile de rien préciser à ce sujet, que, le scrutin ayant été ajourné dans certaines provinces envahies par le choléra, et un assez grand nombre d’élections doubles nécessitant de nouvelles opérations électorales, il reste environ cent députés à nommer encore. En réalité, ce sont des élémens nouveaux qui vont se trouver aux prises dans l’assemblée qui doit se réunir le 8 novembre, et la question est de savoir si elle aura assez d’ascendant pour dominer toutes les difficultés, ou si elle ne fera qu’ajouter elle-même à la confusion. Le malheur veut que