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voir un peu de tout : langues mortes, histoire, sciences exactes ou naturelles ; on lui tend des pièges, on cherche où est le défaut de cette cuirasse dont ses préparateurs l’ont armé. L’associé ès arts s’en tire à moins de frais : il demande à ses juges de l’interroger sur ce qu’il sait ; ses juges s’y prêtent de bonne grâce et le tiennent quitte du reste. Il y a un peu de bonhomie dans la pédagogie anglaise, mais aussi que de fictions dans la nôtre ! Il est au moins douteux que l’esprit du bachelier ait beaucoup à gagner aux violences qu’on lui lait, et que nos questionnaires raffinés y laissent des traces profondes.

Si accommodans qu’ils soient, les examens locaux ont eu plus de crédit auprès des écoles qu’auprès des familles. Autant les grades des universités sont recherchés, autant le titre d’associé ès arts est délaissé. On se demande à quoi il répond, en quoi il peut servir, et c’est un motif suffisant pour que les élèves n’y tiennent pas et que les familles y renoncent. En réalité, jusqu’à présent, il n’a servi ni répondu à rien : nulle part on ne l’exige ; nulle part non plus on n’en tient compte ; il n’a encore ni prestige ni utilité. Les universités ne semblent avoir émis là qu’une monnaie de billon dépréciée avant d’avoir circulé. Dans les trois années qui suivirent l’exécution du nouveau statut, il n’y eut en moyenne que 700 certificats distribués sur une population de 18 millions d’âmes. C’était un premier échec ; il a été suivi d’autres échecs plus sensibles. L’idée première de ce moyen d’ingérence appartenait au clergé ; il voulait vérifier jusqu’à quel point l’esprit de schisme ou d’indifférence avait pénétré dans les écoles. L’instrument de cette vérification était la section religieuse introduite dans les programmes. Les tableaux des examens passés n’ont pas dû lui fournir là-dessus de grands sujets d’édification. En 1862, par exemple, sur 759 élèves examinés, il y en a eu 380 qui ont refusé de satisfaire à cette partie du programme, sensiblement la moitié. L’orgueil national a eu également à souffrir d’un autre détail de ces épreuves. Pour élaguer les incapables, on avait imaginé une section obligatoire, réduite aux plus simples élémens, sans grec ni latin, et ne dépassant pas le niveau d’une bonne instruction primaire. Sur les 759 candidats, 224 ont échoué à cet examen, les trois dixièmes des inscrits, et la plupart pour des écarts d’orthographe trop multipliés. Ces résultats dénonçaient deux faits gravés, les défections vis-à-vis de l’église établie et la faiblesse des études élémentaires. On devait s’en émouvoir, et on n’y a pas manqué ; la presse a mêlé ses doléances à celles des hommes de robe ; on s’est piqué de zèle, on a fait un effort, et il se peut qu’à la longue une revanche soit prise de ces premiers avortemens. Si rien ne s’impose en Angleterre, avec de la persévérance et du temps, tout s’accepte. Il suffit que la valeur