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tembre pour revenir au camp français. Sur la route, qui la veille était complètement libre, il trouva l’armée chinoise couvrant toute la plaine et s’étendant jusqu’au campement de Tchang-kia-wan, où il était convenu que stationneraient les troupes alliées. Les généraux, avertis déjà par les éclaireurs, n’en continuèrent pas moins leur marche en avant, et bientôt ils rencontrèrent l’armée chinoise, qui commença le feu. Cette armée, forte de vingt-cinq à trente mille hommes et de quatre-vingts pièces d’artillerie, était commandée par San-ko-lin-sin. Le général Montauban et sir Hope Grant l’abordèrent avec leurs quatre mille hommes, et en quelques heures ils la mirent en pleine déroute ; mais en même temps on avait appris que plusieurs des officiers qui étaient allés à Tong-chaou avaient été tués ou faits prisonniers en traversant, à leur retour, les lignes chinoises. On n’avait aucune nouvelle de M. Loch, de M. Parkes, de M. d’Escayrac de Lauture, de l’escorte. — Quel parti prendre ? L’attaque du 18, commencée par les Chinois, avait-elle été concertée entre le prince Tsaï et San-ko-lin-sin ? Était-ce un guet-apens prémédité, ou seulement un acte personnel du général tartare, qui, sans se préoccuper des négociations ouvertes et contrairement aux intentions des commissaires impériaux, aurait tenté de venger l’échec qu’il avait subi à Takou ? Dans cette dernière hypothèse, le combat de Tchang-kia-wan pouvait n’être considéré que comme un incident honteux pour le général tartare, glorieux pour les alliés, et indépendant de l’œuvre diplomatique. Tout espoir de paix n’était pas perdu. Ce fut à cette pensée que s’arrêtèrent d’abord les ambassadeurs ; ils comptaient que MM. Parkes, d’Escayrac de Lauture et leurs compagnons allaient revenir au camp, et alors ils se proposaient de faire entrer l’armée alliée dans Tong-chaou et d’y signer les conventions en acceptant les excuses que le prince Tsaï aurait à leur adresser pour la conduite de San-ko-lin-sin. Les heures s’écoulaient cependant sans que l’on vît reparaître ceux que l’on attendait avec une fiévreuse impatience. Un parlementaire envoyé à Tong-chaou n’y avait point trouvé le prince tsaï. Le gouverneur, devant qui il fut conduit, parut très étonné que l’on n’eût point de nouvelles de M. Parkes, qui, disait-il, avait quitté la ville bien avant le combat. On était donc sous le coup des plus tristes pressentimens, et il fallait absolument agir : situation pleine d’incertitudes, d’angoisses, de périls même, que nous trouvons résumée clairement dans une dépêche que le baron Gros écrivit le 19 septembre au général Montauban.


« L’occupation de Tong-chaou et la marche des alliés sur Pékin seraient probablement le seul moyen en ce moment de peser sur le gouvernement chinois ; mais c’est aux commandans en chef des forces alliées d’agir en raison des chances de succès que peut offrir une expédition de ce genre