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l’heureux vainqueur d’Austerlitz avait jugé à propos de mettre en opposition, on se rappelle dans quels termes, la promptitude avec laquelle il savait prendre ses résolutions et la lenteur ordinaire de la cour de Rome dans l’expédition des affaires ecclésiastiques, principalement celle qu’elle avait mise à régler les affaires qui regardaient l’Allemagne. Pie VII n’oublie pas de répondre à ce reproche, avec quelle douceur, on va le voir :


« Votre majesté nous aurait épargné la tristesse de son blâme, si elle avait bien voulu réfléchir que ces matières ne peuvent absolument point se passer de la maturité des conseils, et que dans ces discussions on ne peut employer cette rapidité dont sont susceptibles les affaires temporelles. Votre majesté précise cette accusation en l’appliquant aux affaires ecclésiastiques d’Allemagne… Elle nous dît que, pour des intérêts mondains et pour de vaines prérogatives de la tiare, on laisse périr des âmes. Nous recevons comme venant de la main du Très-Haut l’humiliante amertume du reproche que votre majesté a voulu nous faire. Dieu et le monde nous sont témoins si des intérêts mondains et de vaines prérogatives ont guidé notre conduite… »


Le pape expliquait ensuite avec une infinie douceur et quelque apparence de raison que les bouleversemens territoriaux produits par le rescrit de Ratisbonne étaient la cause première de ces retards inévitables. Il ne pouvait enfin s’empêcher de remarquer, mais sans aucune aigreur, que l’organisation, déjà si difficile, des églises d’Allemagne, avait dû être ajournée, et se trouvait en ce moment plus compliquée que jamais par suite de la guerre récente et des nouveaux changemens que l’empereur lui-même avait apportés dans ces pays. La touchante résignation et la patience toute chrétienne avec laquelle Pie VII se défendait contre des imputations cruelles qu’il ne croyait pas avoir en aucune façon méritées faisaient place à d’autres sentimens lorsqu’il avait, comme pontife et comme souverain temporel, à réfuter les singulières maximes du nouveau Charlemagne. le ton de sa réponse, sans jamais sortir des bornes de la plus extrême modération, s’animait alors d’un accent inattendu de fermeté princière et de fierté sacerdotale.


« Votre majesté établit comme principe qu’elle est l’empereur de Rome. Nous lui répondrons avec une franchise tout apostolique que le pape, devenu souverain de Rome depuis un nombre de siècles si considérable qu’aucune autre souveraineté sur la terre ne se peut vanter de remonter plus loin dans l’histoire, ne reconnaît point et n’a jamais reconnu chez lui aucune puissance qui lui fût supérieure. Nous ajouterons qu’aucun empereur n’a jamais eu le moindre droit sur Rome. Votre majesté est infiniment grande ; elle a été élue, couronnée, consacrée,