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côté, vers la mer ; c’est pourquoi, au lieu d’un cercle parfait, on ne voit plus qu’un demi-cercle lorsqu’on s’élève assez haut pour embrasser du regard l’ensemble de la Somma et reconstituer ses lignes générales.

Le cône du Vésuve n’existait pas alors. Il s’est formé par l’effet des éruptions successives, car il y en a eu un grand nombre dans les temps modernes : l’histoire en a enregistré plus de quarante-cinq ; malheureusement elles n’ont été l’objet d’aucune observation : ni le moyen âge ni la renaissance n’en ont fait profiter la science. À partir de l’an 79 de notre ère, lorsque le Vésuve eut fait sa grande explosion, les cendres, les pierres lancées en l’air et retombant perpendiculairement, les laves qui se refroidirent auprès de l’orifice, formèrent peu à peu autour du centre d’éruption une sorte de muraille circulaire qui fit talus en dehors, et alla se rétrécissant à mesure qu’elle s’élevait. Chaque siècle vit grandir ce monceau de scories, qui finit par atteindre une hauteur de 400 mètres. Le cône a ses racines au milieu de l’ancien plateau de la Somma, c’est-à-dire du cratère primitif. Il est exactement concentrique à ce cratère, de même que le pic de Ténériffe, qui est un cône de formation semblable, s’est élevé au centre du cratère qui l’a produit, de même qu’à Santorin (l’ancienne Théra) la lave qui s’échappait du fond d’un cratère effondré s’est exhaussée peu à peu en se refroidissant au fond de la mer, et a fini par émerger sous forme d’îlots. La rade de Santorin n’est autre chose que l’intérieur d’un volcan qui s’est affaissé et a été rempli par les flots. Les falaises de l’île ne sont que cendres et que scories. Il y a peu d’années, on voyait encore à travers la transparence de l’eau les pics sous-marins qui s’exhaussaient chaque année par le refroidissement des déjections volcaniques. On sait comment en 1867 les coulées de lave ont atteint la surface, et quels développemens subits ont pris les phénomènes éruptifs. Devant des faits aussi curieux, celui qui donne carrière à son imagination arrive à prévoir un temps où le volcan comblera de nouveau ce qui est un abîme aujourd’hui, reformera la montagne qui s’est écroulée, et refoulera la mer qui a pris sa place. La naissance du cône du Vésuve n’a donc rien qui puisse surprendre, surtout lorsqu’elle est expliquée par des exemples contemporains et par des accidens semblables arrivés sous nos yeux.

Je disais que ce cône, à mesure qu’il s’est élevé, a restreint l’orifice du volcan. Aujourd’hui en effet le périmètre du cratère est à peine de 600 mètres. Au XVIIe siècle, il avait près de 7 kilomètres de tour. Du moins c’est ce que nous apprend le récit de l’abbé Braccini, qui visita et décrivit le volcan peu de temps avant la grande éruption de 1631. Maintenant au contraire ceux qui descendent dans