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et s’embarrassent peu des oppositions particulières et locales, ont une précaution dont nous pouvons faire notre profit. Les commandans des bataillons de la landwehr siègent comme les sous-préfets (landräthe) dans les conseils de révision, mais non pour enregistrer simplement les exemptions qu’il plaît aux magistrats civils de prononcer. Plus d’un commandant de nos gardes mobiles a compris ses fonctions à la prussienne, et il a bien fait. Nul n’est plus intéressé au maintien de l’effectif de sa troupe ni au respect de la règle commune. Choisi parmi les notables de son arrondissement, il connaît assez le pays pour être difficilement trompé sur la situation de chacun de ses hommes ; responsable envers l’autorité militaire, il exige que son bataillon soit au complet ; appliquant à tous les citoyens du même âge la loi rigoureuse du service, il trouve dans tous la même disposition à l’obéissance. Dans les localités où ces précautions n’ont pas été nécessaires, les exigences évidentes du salut public ont suppléé aux lacunes de l’organisation ; la détresse du pays a fait taire les réclamations égoïstes. Néanmoins, si la garde mobile devait plus tard être l’appoint nécessaire de l’armée active, ou bien si des périls plus pressans encore devaient imposer une seconde levée, il ne serait pas sage de compter uniquement sur ce mouvement d’opinion qui a été plus fort que les répugnances primitives, et de négliger les exemples utiles donnés dans plusieurs départemens.

À ce premier caractère de la garde mobile, le service personnel et obligatoire, il en faut ajouter un second, l’engagement sans autre limite réelle que celle de la guerre présente. Il semble que le contraire fût impossible ; en aucun pays, les soldats ne peuvent quitter le drapeau tant qu’il est déployé sur les champs de bataille ; le devoir est plus impérieux encore quand il s’agit de la défense du sol national, de la terre sacrée foulée par l’étranger, quand la guerre est la fonction de tous, quand la nation est un régiment, et que le cri de la patrie a d’un seul coup immatriculé tous ses enfans dans l’immense légion de ses défenseurs. Cependant nos assemblées de la révolution portèrent si loin l’horreur du métier des armes et la crainte des influences militaires que les citoyens en dehors de l’armée permanente étaient engagés seulement pour un an. Ces soldats, d’abord volontaires de nom et de fait, puis de nom seulement, obligés de marcher en vertu de réquisitions adressées aux communes, n’étaient retenus que jusqu’au 1er décembre, et, loin d’attendre ce terme, ils anticipaient leur départ sous les moindres prétextes. Que l’on fût devant l’ennemi, que la frontière fût envahie, ils s’en revenaient comme des moissonneurs ou des ouvriers de campagne laissant la moisson ou le labourage inachevé, sans crainte des gen-