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bien triste sur les coteaux de Montreuil et de Rosny, et devant les Prussiens à Villemonble ! Les jeunes gens de l’Hérault, plus gais, plus insoucians, ne se sont pas fait remarquer par la coquetterie de leur tenue. C’est d’ailleurs un léger défaut qu’ils rachètent largement par la vivacité de leur patriotisme.

La France de l’ouest, moins menacée par l’invasion, a donné l’exemple du dévoûment le plus complet. La Normandie a fourni à la défense les bataillons de la Seine-Inférieure. Quant à la Vendée et à la Bretagne, l’opinion publique a rendu pleine justice à leur courage, à leur amour de l’ordre et du pays. On a remarqué la fière protestation que le 1er bataillon de la Vendée signa contre la tentative de la commune au lendemain du 31 octobre. Tout Paris a retenti de l’éloge que les braves Bretons ont mérité dans les rencontres avec l’ennemi, à Châtillon, à L’Hay, à Champigny, à Garches. Il ne s’attendait peut-être pas à trouver des héros parmi ces enfans du Finistère qu’il vit entrer dans la première quinzaine de septembre, précédés de leurs binious et marchant joyeusement au son de cette musique peu guerrière. Les bataillons d’Ille-et-Vilaine, auxquels la Bretagne entière décernera la palme, se composent d’hommes plus calmes, d’une taille moins élevée, mais d’une résolution à toute épreuve. Celui de Saint-Malo, se souvenant toujours que sa ville s’est suffi à elle-même dans tous les temps comme une petite république, s’était réuni dans son arrondissement. Les quatre autres bataillons, rassemblés à Rennes le 15 août, étaient à Paris le 7 septembre avec les hommes de Saint-Malo, possédant déjà le maniement du fusil à piston. Au moment même de la convocation, ils n’avaient pas le cadre de leurs officiers ; au bout de quinze jours, tout était fait : d’anciens militaires avaient pris le commandement des bataillons, désigné les capitaines et les lieutenans. Dès la troisième semaine, ils étaient parmi nous ; ceux de Vitré, bien qu’ils eussent reçu l’ordre de rester en arrière et de rejoindre l’armée de la Loire, avaient voulu marcher avec leurs camarades. Au bout d’un mois, le 19 septembre, ils figuraient à Châtillon, où l’on sait qu’ils donnèrent l’exemple et rendirent le courage à la ligne. On vit ces jeunes gens si nouveaux au feu tenir les derniers dans leur redoute et tirer lentement, couchés derrière les sacs à terre. Bons chasseurs presque tous, ils économisaient leur poudre et frappaient à coup sûr. Le courage de ces hommes est sérieux et réfléchi comme toute leur conduite ; il résulte d’un sentiment profond du devoir. Chacun des cinq départemens de cette province a pourtant ses traits particuliers qui le distinguent dans la vie des camps. La Loire-Inférieure, traversée par son large fleuve, est plus ouverte aux influences du dehors ; sa population, composée