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décembre 1806, il en a déjà déterminé les limites, car, dans un traité du 11 décembre avec l’électeur de Saxe, il oblige celui-ci à céder au prince désigné par sa majesté l’empereur des Français, roi d’Italie, ses possessions de Thuringe situées entre l’Eichsfeld et Erfurt. Après avoir hésité longtemps s’il n’y engloberait pas les petits duchés saxons de Weimar, Gotha, Coburg, Meiningen, Hildburghausen, il se décide à ne pas lui faire dépasser le cours de la Werra. Il nous reste à voir aux dépens de quelles dynasties Napoléon réussie à établir la sienne sur un des trônes de l’Allemagne nouvelle.


I.

La journée du 14 octobre 1806 fut le coup de mort de la domination prussienne en Allemagne. La puissance morale fondée par Frédéric II fut brisée comma la puissance matérielle; le fruit de tant d’efforts depuis la fameuse ligue des princes pour amener les états secondaires de l’Allemagne à se ranger sous l’hégémonie prussienne parut perdu. Les cliens de la Prusse furent partout sacrifiés. Dans l’Allemagne occidentale, trois maisons souveraines avaient « cessé de régner. » La maison d’Orange, qui avait déjà été chassée de Hollande, terminait son éphémère domination à Fulda; son chef avait commandé une division de l’armée prussienne, c’en fut assez pour attirer la colère intéressée de l’empereur. Deux autres dynasties, qui avaient jeté dans les pays qu’elles gouvernaient des racines profondes et dont la fortune remontait aux origines mêmes de l’Allemagne, ne coûtèrent pas plus d’effort à déraciner : la Hesse-Cassel et Brunswick.

Il est curieux que la Hesse-Cassel ait deux fois, en 1806 et en 1866, payé les frais de la réorganisation de l’Allemagne. Le fondateur de la confédération du Rhin la rencontra sur son chemin, comme plus tard le promoteur de la confédération de l’Allemagne du nord ; tous deux la brisèrent sans pitié.

Le landgrave Guillaume, qui fut plus tard Guillaume Ier, électeur de Hesse-Cassel, était né en 1743 du landgrave Frédéric II et d’une mère anglaise, Marie, fille du roi George II. Quand le landgrave Frédéric se fit catholique, il fallut donner des garanties aux sentimens protestans du pays violemment surexcités. Sous la médiation du roi de Prusse Frédéric le Grand fut conclu un acte de garantie religieuse (1754), en vertu duquel le prince héritier dut être soigneusement élevé dans la religion de ses pères et obtenir à sa majorité le gouvernement du comté de Hanau. Élevé à Gœttingen, puis à la cour de son oncle Frédéric V de Danemark, il dut partager avec ses deux frères, Charles et Frédéric, les leçons excellentes