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réparer le navire avec les ressources du pays, ne donneront pas de certificat, d’autre part le ministère de la marine recevra un rapport du commandant de la station constatant que les réparations qu’il proposait n’ont pas été acceptées. La compagnie d’assurance sera prévenue, et la prime ne sera pas payée, ou tout au moins y aura-t-il matière à contestation. Malheureusement les fiords sont nombreux en Islande, et le gouvernement français ne peut faire stationner partout un navire de guerre. Ce serait donc aux assureurs de faire garantir par des agens spéciaux leurs intérêts, si insuffisamment sauvegardés. Il faut ajouter que, si le navire n’est pas trop délabré, s’il n’est assuré que pour une somme égale à sa valeur réelle, les propriétaires n’ont pas d’intérêt à le faire condamner, puisqu’ils ne rentreraient alors que dans leurs déboursés, et perdraient par contre le produit éventuel du reste de la saison de pêche. Aussi les faits auxquels je viens de faire allusion, et qui touchent de bien près à la baraterie, ne constituent-ils que des exceptions, et le plus grand nombre des bâtimens avariés trouve plus avantageux de se faire remettre en état de continuer la pêche. Vers le commencement de mai, on les voit rallier la terre et attendre, en péchant à petite distance de la côte, le passage des navires de guerre. Ceux-ci font généralement trois tournées pendant leur séjour en Islande. Dans la première, l’un, prenant par l’est, se dirige vers Faskrud-Fiord, le mouillage le plus fréquenté, où il séjourne un mois ou un mois et demi ; l’autre visite les fiords de la côte ouest, remonte vers le nord jusqu’à ce qu’il soit arrêté par les glaces, et rentre ensuite à Reikiavik. Dans la seconde tournée, le bâtiment chargé de la côte est en parcourt toutes les baies ; l’autre communique avec les navires en pêche dans l’ouest et visite les fiords du nord. La troisième tournée est généralement consacrée au tour complet de l’île effectué en sens inverse par les deux navires, qui, après s’être croisés dans leur voyage, se rejoignent vers la fin d’août à Reikiavik, d’où ils repartent pour Cherbourg. Comme il serait inutile de faire faire au lecteur ce triple voyage, dans lequel les mêmes lieux sont visités à plusieurs reprises, je me bornerai à lui faire faire en une seule tournée le périple de l’Islande.


III

Lorsqu’en sortant de la rade de Reikiavik on remonte le long de la côte ouest pour se diriger sur Patrix-Fiord, où l’on doit rencontrer le gros des pêcheurs, on aperçoit, si le temps est clair, devant soi un cône gigantesque qui s’élève au-dessus de la surface de la mer. C’est un volcan éteint haut de 5,000 pieds, le Sneffiels-Jœkul,