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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 juin.

Il faut bien voir les choses comme elles sont : il est certain que les affaires d’Égypte ont eu depuis quelques semaines le privilège de secouer et d’affecter désagréablement l’opinion. Elles ont causé une émotion assez profonde, presque autant de surprise que d’émotion et, s’il est possible, encore plus d’ennui que de surprise. Toutes les fois qu’elles se réveillent, ces affaires égyptiennes ont de l’importance sans doute parce qu’elles mettent en jeu les plus sérieux intérêts, parce qu’elles touchent à cette question d’Orient, éternelle préoccupation de toutes les politiques. Si aujourd’hui elles ont plus vivement remué et troublé le sentiment public en France, si elles ont paru prendre une signification plus marquée, une gravité nouvelle, c’est qu’elles ont été comme la révélation soudaine de toute une situation sur laquelle on semblait se méprendre.

Elles ont mis à nu tout ce qu’on ne connaissait qu’à demi, tout ce qu’on n’entrevoyait qu’à travers des déclarations vagues faites pour rassurer un parlement, — des erreurs ou des inconsistances de diplomatie, des illusions de cabinets, des calculs frivoles, des contradictions, des démarches sans autorité et sans suite. Elles ont dévoilé tout à coup cette situation isolée et amoindrie où la France se trouvait amenée sans le savoir par une série de fautes et de méprises, par une politique évidemment peu réfléchie et peu prévoyante. Car enfin c’est la vérité telle qu’elle se manifeste dans les faits, telle qu’elle est écrite dans ces documens diplomatiques publiés depuis quelques jours à Paris et à Londres. On a passé plus d’une année à s’agiter, à débattre des combinaisons, à chercher une solution de la question égyptienne par une entente particulière de la France et