Page:Revue des Deux Mondes - 1882 - tome 52.djvu/637

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Telle est, en effet, la voie périlleuse dans laquelle on s’est engagé. La proposition primitive voulait un collège de filles par département. On a compris bien vite que les ressources de toutes sortes faisaient défaut pour une aussi vaste organisation et on s’est borné à des créations facultatives, pour lesquelles on a fait appel au triple concours de l’état, des départemens et des communes. Toutefois, on n’a pas renoncé à l’espoir de les multiplier ; non-seulement on accueille avec faveur les propositions des moindres cités, mais on provoque celles des grandes villes et, pour les obtenir, on consent à discuter leurs plus déraisonnables exigences, on n’est pas éloigné de leur abandonner quelques-unes des prérogatives dont l’état se montre ailleurs le plus jaloux. D’un autre côté, dans la rédaction des programmes, on a paru craindre un niveau trop élevé qui aurait pu convenir pour un établissement modèle, mais pour lequel on n’aurait pas trouvé, dans les nombreux établissemens que l’on rêvait, un personnel de maîtresses suffisamment préparé et une clientèle d’élèves suffisamment étendue. La même préoccupation paraît avoir inspiré les dispositions relatives aux examens. Ils sont divisés en deux degrés : l’un, se rapportant aux trois premières années ; l’autre, à l’ensemble des études. Cette division, considérée en elle-même, est excellente ; elle correspond à la distinction de l’examen de grammaire et du baccalauréat dans l’instruction secondaire des garçons ; mais ce qui est tout à fait inacceptable, c’est l’institution, pour l’examen du premier degré, d’un certificat qui porte le titre pompeux de « certificat d’études secondaires. » On a pensé sans doute que beaucoup de jeunes filles se contenteraient de trois années d’études et que peut-être un certain nombre d’établissemens n’iraient pas au-delà, et on a voulu laisser croire que ces trois années, à peine suffisantes pour une instruction primaire supérieure, pourraient représenter des a études secondaires. » Il y a là, non dans le certificat lui-même, mais dans le titre qui lui est donné, une sorte de charlatanisme peu digne d’une institution publique[1].

La nouvelle loi admet l’internat à titre facultatif, comme une annexe purement municipale des lycées de jeunes filles. C’est lui faire trop d’honneur ; car, en lui donnant une consécration légale, avec l’espoir d’une subvention de l’état, on encourage les villes à en entreprendre la création. Il serait imprudent de détruire les internats de garçons ; mais, s’ils n’existaient pas, il n’y aurait pas lieu

  1. Nous empruntons ces critiques à un rapport de M. Maurice Vernes à la Société pour l’étude des questions d’enseignement secondaire (Bulletin pédagogique, des 27 avril et 4 mai 1882). M. Vernes a reproduit ses observations dans un nouveau recueil qui vient de se fonder sous le titre suivant : l’Enseignement secondaire des jeunes filles.